Le Club Memori
Pour ceux qui veulent comprendre, maintenir et améliorer leur mémoire.
Vulgarisation scientifique, méthodes, trucs et astuces pour bien mémoriser.

Vu les effets négatifs du stress sur l’organisme et le psychisme on aimerait bien s’en débarrasser. Et facilement si c’est possible ! Est-ce réaliste ? Y a-t-il des moyens éprouvés pour lutter contre le stress ou pour le dissoudre ? C’est ce qu’on va voir.

Mais avant, il va falloir définir de quoi on parle. L’angoisse, le stress, le bon stress, le mauvais stress, le stress au travail, le stress post-traumatique et j’en passe… Il va falloir s’y retrouver. Est-ce la même chose ou pas ?

C’est l’objet de ce (gros) article. Heureusement vous avez une table des matières pour vous aider…

Note pour les lecteurs habituels de ce blog sur la mémoire humaine :

Savez-vous que le stress altère la perception, l’attention, la concentration et donc aussi la mémoire ? C’est largement prouvé. Mais si vous le réduisez ou si vous l’éliminez, alors votre mémoire reprend alors immédiatement des couleurs. C’est pourquoi je m’intéresse au stress. Pour autant les rapports entre stress et mémoire seront traités dans un autre article, à venir.

Revenons à nos moutons…

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Le stress, qu’est-ce que c’est ? Définition.

Le mot stress est devenu aujourd’hui un mot à tout faire. Il a de multiples significations. Citons en vrac, anxiété, angoisse, réaction d’adaptation, détresse. Mais aussi tension, nervosité, oppression, désarroi devant les difficultés de la vie, etc.

Le canadien Selye a popularisé ce mot stress avec une signification plus précise. On peut le constater dans son livre inaugural sur le sujet: « Le stress de la vie ».

Mais qu’est-ce que ce mot désigne donc ?

Le stress est-il organique ?

Selye définit le stress comme un « syndrome général d’adaptation ». Autrement dit, le stress c’est l’ensemble des actions automatiques de l’organisme pour s’adapter à une situation qui le met à l’épreuve. Ce syndrome est « général ». Cela signifie qu’il n’est pas spécifique à la nature de la situation. Il suffit que votre organisme ne soit pas adapté (qualitativement ou quantitativement) à la situation pour que se crée le syndrome.

Pour simplifier, je dirais que le stress est une tentative d’adaptation… à ce à quoi vous n’êtes justement pas adapté. Les exemples de telles situations sont nombreux : traumatisme, déménagement, accident, mariage, accusation injustifiée, examen, perte d’emploi, rencontre aux enjeux importants, divorce… Mais aussi incendie, intervention chirurgicale, apparition d’une guêpe ou d’une souris… Sans oublier promotion ou affectation à un nouveau poste, etc. Le panel est large.

En d’autres termes, dès qu’une situation vous « dépasse » et qu’un facteur émotionnel intervient, il y a stress. Il n’y a donc pas besoin d’un événement d’une gravité exceptionnelle pour que vous soyez « stressé ». Chez les psychologues, nous considérons d’ailleurs que le déménagement ou le mariage sont d’assez bons exemples de « stresseur ». Par ce terme, on entend les situations « stressantes ».

Cependant, un organisateur de mariages professionnel sera généralement moins confronté au stress que vous. Ce qui est stressant pour l’un ne l’est pas forcément pour l’autre.

Alors le stress est-il psychologique ?

A première vue, on pense à des réactions psychologiques à ces situations stressantes. Mais Selye, qui est endocrinologue, élimine toute psychologie. Il définit le stress uniquement au regard des réactions purement physiologiques, biologiques, hormonales. Pour lui, le stress est essentiellement organique.

Pourtan,t l’aspect psychologique ne peut pas être évacué d’un revers de main. Ainsi, la peur est sans doute une émotion organique. Mais « être peureux » est aussi une inclination psychologique. Et une personne peureuse, se prépare en quelque sorte à avoir peur avant même que la situation potentiellement stressante n’apparaisse. Elle est probablement plus « stressable » qu’une autre.

Cela et vrai. Mais le fait qu’une personne sera plus facilement « dépassée » qu’une autre ne change rien à la nature des phénomènes d’adaptation organiques. Peu importe qu’ils se produisent rarement chez l’un et souvent chez l’autre. Quand ils se produisent, ils ont les mêmes caractéristiques chez l’un et chez l’autre.

Alors non, le stress n’est pas psychologique en soi. Mais psychologiquement, vous pouvez être plus ou moins « à risque ». Si vous êtes « prédisposé » au stress, vous serez plus vite « dépassé ». Vous supporterez moins qu’un autre le stress intense et / ou répété. Vous courrez donc plus de risques de vous acheminer vers un stress cumulatif, ou un stress chronique.

Quoi qu’il en soit, quand on parle de stress aujourd’hui, c’est dans une définition plus large. On y inclut maintenant l’état psychologique qui le favorise ou qui en découle. D’ailleurs, vous direz facilement « je suis stressé ». Mais certainement pas… « mon organisme est stressé » ! Ce qui est une façon d’introduire votre psyché dans le phénomène aux côtés de votre organisme…

Le stress est-il forcément mauvais ?

Malgré sa mauvaise réputation, la réponse est non. Le stress est une réaction adaptative. Il se déclenche quand la situation dépasse les possibilités habituelles de votre organisme. Il interrompt ou limite tout ce qui consomme de l’énergie, la digestion par exemple. Il augmente le rythme cardiaque et le débit sanguin. Il augmente les apports en oxygène et glucose aux muscles et au cerveau.

Il focalise votre attention sur le danger tout en exacerbant vos perceptions. Vous êtes prêt à réagir. Mais que se passerait-il si le stress n’existait pas ? Eh bien, votre organisme continuerait paisiblement sa digestion, votre cœur battrait paisiblement; vos muscles ne recevraient pas un supplément de glucose et d’oxygène; vous ne seriez pas en état d’alerte.

Dès lors, vous contempleriez paisiblement l’incendie de votre maison… Et vous iriez voir de votre pas habituel si vos enfants ne sont pas restés dedans, par hasard. Et si un individu excité s’avançait une arme à la main ? Oh… vous l’attendriez tranquillement pour discuter n’est-ce pas ? Et face aux retards dans l’organisation d’un mariage par exemple vous n’attendriez tranquillement que ça s’arrange tout seul.

En revanche, le stress supplémente votre organisme en énergie. Ce dernier pourra donc l’utiliser. Par exemple pour foncer dans votre maison qui brûle; pour récupérer vos enfants et fuir avec eux pour vous mettre en sécurité. Passé le premier moment de « gel » ou de sidération, le stress vous permet d’agir sans réfléchir pour votre sauvegarde ou celle des autres.

En-deçà des situations extrêmes, le stress peut être évidemment plus modéré. Il peut même être stimulant. C’est notamment le cas dans le sport. Ou encore lorsque vous avez un défi professionnel à relever. Dans ces cas-là, on ira jusqu’à parler d’un « bon stress ».

Qu’est-ce que le bon stress ?

Le terme a été introduit par Selye sous l’appellation « eustress ». Un niveau minimal d’eustress serait même indispensable à l’organisme et au psychisme humain. On est alors dans le domaine de la stimulation à agir. Dans l’incitation à réaliser des choses en dehors de la routine ou de nos capacités habituelles.

Le stress fait dans ce cas figure d’énergie positive. Une énergie capable de mobiliser des ressources et de donner du sel à la vie. En l’absence de stress minimal, vous ne mobilisez pas vos ressources. Vos capacités stagnent.

Dans votre métier, vous pouvez difficilement progresser sans stress. Ou alors très lentement. Et le gain d’efficacité que vous atteindrez alors devra sans doute plus à la routine qu’à l’augmentation de vos compétences. Celles-ci peuvent augmenter plus vite si vous avez un défi à relever. Parce que vous serez obligé de progresser « sur le tas ».

Dans ces conditions vous pouvez vous dépasser sans être dépassé.

C’est toute la différence entre le stress accepté, voulu, et le stress subi. Entre le stress anticipé (recherche d’une meilleure performance) et le stress imprévu (accident) ou mal anticipé.

Chercher le dépassement sans être dépassé, c’est aussi en jeu dans le sport. S’il y a un milieu où l’on cherche toujours le dépassement c’est bien celui-là. Mais s’il y un milieu ou il faut prendre garde à ne pas tirer inconsidérément sur les ressources de l’organise, c’est bien celui-là aussi.

Dans le sport comme en entreprise, de même que dans les défis personnels ou familiaux, il existe une limite. Au-delà, le bon stress se transforme en « distress » au sens moderne du terme. C’est-à-dire une détresse de l’organisme, bref, le stress !

Les différentes phases du stress. Comment le stress se développe-t-il ?

Tout dépend de de votre sensibilité au stress et de l’intensité de l’événement. Prenez le cas d’un accident très brutal : une attaque ou un attentat, par exemple. Dans ces cas-là, à moins d’être un professionnel entraîné, on est immédiatement au-delà du stress. On est figé dans l’incompréhension de ce qu’il se passe . Et dans l’incapacité d’agir.

Il s’agit là d’un événement potentiellement traumatique. Mais le stress viendra plus tard, dans l’après-coup. On parlera alors de « stress post-traumatique ».

Si l’événement est de forte intensité mais moins fortement, le stress peut être immédiat. Vous êtes alors en état de stress aigu. Si l’intensité est encore moindre, le stress le sera aussi. Mais il faut tenir compte du facteur temps. Si le stress dure ou s’il devient répétitif, il va devenir très impactant. Et cela se peut, même en cas de faible intensité. Bref, il y a de multiples configurations.

A vrai dire, dans la plupart des cas, l’événement ne met pas votre vie en jeu. Il n’est pas forcément de forte intensité. Statistiquement parlant, il est plutôt d’intensité moyenne. Mais assez fréquemment répétitif ou prolongé dans le temps.

Au-delà de ces considérations, les auteurs considèrent que le stress est généralement évolutif. Classiquement, ils distinguent 3 phases + 1.

L’alarme

L’alarme est un état psychique et physiologique. Il vous saisit en présence d’une situation inquiétante ou d’un danger. En ce cas, votre cerveau envoie à votre organisme un message d’adrénaline et de cortisol. Le cortisol est l’hormone du stress par excellence.

Ce message est reçu 5 sur 5 par votre organisme. Il y un court moment de « gel » pendant lequel vous tentez de prendre la mesure de ce qu’il se passe. Pendant ce temps-là votre organisme se met en position d’attente pour l’attaque ou la fuite. On pourrait appeler ça le « stress aigu ».

La psychologie joue un rôle important à ce moment-là. Un tel prendra la fuite sans demander son reste. Un autre deviendra peut-être offensif. Mais attaquer ou fuir est juste le choix binaire de votre organisme. Un choix sans pensée. Mais vous n’êtes pas qu’un organisme. Vous devriez pouvoir faire un choix éclairé par votre analyse de la situation.

Il faut bien comprendre que le choix binaire « combattre ou fuir » est celui de votre cerveau ancien. Ses automatismes sont restés identiques à ce qu’ils étaient dans la préhistoire. Or, de nos jours, c’est rarement adapté.

Cerveau ancien contre cortex…

Aujourd’hui, vous avez beaucoup d’autres options. Par exemple, vous cacher ou parlementer. Appeler des secours par téléphone etc. Mais votre cerveau ancien ne le sait pas ! Seul votre cortex cérébral (la partie la plus récente dans l’histoire de l’Homme) le sait. Seulement il s’est développé par-dessus le vieux cerveau et il ne le contrôle pas. Au contraire, votre cerveau ancien paralyse votre cortex et sa rationalité. Il donne un prime aux émotions. Vous ne pouvez même plus réfléchir efficacement.

La seule chose que votre cortex peut faire c’est corriger le tir après coup. Il ne pourra vous proposer des alternatives que lorsque cette phase aigüe sera passée. En attendant, vous y aurez quand même eu droit en mode automatique: inondation d’adrénaline et de cortisol, tachycardie carabinée, pic de tension et grand moment d’angoisse !

La résistance

Evidemment, cette phase du stress n’existe pas si vous avez réussi à gérer la situation. En revanche elle apparait lorsque la situation stressante perdure. Ou si les stresseurs s’accumulent. La persistance, la répétition et l’accumulation de situations stressantes aboutit en effet au stress cumulatif ou chronique. Dans cette phase les sécrétions d’hormones sont continues mais à moindre intensité que lors de la phase d’alarme. On peut alors parler d’une phase d’adaptation. On résiste, on s’adapte.

Les effets sont donc moins rapides et moins intenses. Mais ils sont permanents. Parmi ceux-ci, on peut signaler la constitution de réserves de glucose, un état de vigilance accrue et la réduction des inflammations. Mais aussi la diminution des défenses immunitaires. On constate aussi une dégradation du fonctionnement des hippocampes, des zones cérébrales de première importance pour la mémorisation.

Dans cette phase de résistance, le rythme cardiaque se calme, la tension baisse. La respiration reprend à peu près ses droits. Toutefois il reste fréquemment une traîne anxieuse, des troubles de l’endormissement ou du sommeil. Et puis une perte d’allant et des difficultés d’attention ou de concentration. Ces dernières impactent directement la mémorisation.

Dans cette phase d’adaptation du stress, d’autres symptômes peuvent également survenir « à la carte ». Cela dépend de vos fondamentaux psychiques : troubles de la digestion ou maux de tête, par exemple. L’adaptation ne se fait donc pas sans dégâts. Toutefois, tout cela tend à disparaître petit à petit lorsque la situation stressante n’existe plus. Mais cela prend du temps.

L’épuisement

Si le facteur de stress persiste, vous ferez connaissance avec cette troisième phase. Cela survient quand les ressources organiques se sont épuisées. Vos réserves de glucose ont fondu, votre organisme n’arrive plus à sécréter l’adrénaline, le cortisol et bien d’autres hormones en quantité suffisante.

Vous êtes alors en proie à une nouvelle symptomatologie. A vous maintenant la fatigue excessive, l’anxiété, la sensibilité exacerbée. Et puis aussi les crises de colères, les palpitations, l’eczéma, les vertiges… Et surtout la dépression. Cela peut commencer comme un lâcher-prise « aquabonique » de découragement. Mais aussi devenir très vite une dépression de derrière les fagots. Et là, votre mémoire se met progressivement aux abonnés absents. Si les facteurs de stress sont professionnels on caractérise assez souvent cet état comme étant un « burn out ».

Bien sûr, votre système immunitaire se déprime encore plus. Très logiquement, vous devenez très sensible aux germes infectieux. Vous tombez souvent malade. Et il n’y a pas que des maladies infectieuses qui se déclenchent dans cette phase. Parfois des allergies, des troubles de l’équilibre, des cancers, diabètes ou troubles cardiaques peuvent faire partie du cortège.

La tentative d’adaptation grâce au stress s’avère désormais un fiasco. Au lieu de vous sauver, le stress vous a mis à terre. On voit ici par la même occasion que l’absence de volet psychologique dans les phases affirmées par Selye trouve ici sa limite. Certes, pour le corps la reconstruction devra faire appel à la médecine. Mais ça ne suffira pas. Pour les dégâts psychiques, il faudra bien mettre aussi la psychologie à contribution.

La récupération

A vrai dire, la récupération n’est pas exactement une phase du stress. C’est plutôt une phase post-stress. C’est la période où la situation stressante a disparu. Ou bien c’est vous qui avez quitté ou fui cette situation.

Dans les deux cas, la récupération n’est pas immédiate et ne va pas de soi. Elle nécessite souvent une aide extérieure, médicale et psychologique. Médicale parce que votre corps est éprouvé. Il va falloir le remettre en état de marche. Psychologique parce que votre psychisme est impacté. Vous avez souvent perdu confiance en vous, par exemple. En fait ces deux approches sont complémentaires et vont de pair. Bien que Selye ne voie que de l’organique dans le stress, en réalité les interactions entre l’organique et le psychique sont continuelles.

Pour la récupération, la plupart des auteurs évoquent, par exemple :

  • le repos
  • l’hydratation régulière, la régulation alimentaire
  • des exercices physiques
  • quelquefois une cure de magnésium
  • et toujours une bonne gestion du sommeil (voir mon article sur cette question).
  • Mais, plus que tout : l’entretien ou la remise en route des relations familiales ou amicales qui sont souvent délaissées en période de stress.

Il faut se rendre à l’évidence : le stress vous isole. Votre famille ne vous voit plus, les collègues ne vous reconnaissent plus etc. De ce fait vous avez perdu tout soutien et n’en avez plus apporté aucun aux autres. La restauration de ces liens joue un rôle de premier plan dans la récupération.

Il semble y avoir un consensus pour associer des actions de récupération active et des actions de récupération passive. Parmi les premières : la restauration des liens avec les autres, les exercices physiques. Parmi les secondes : la restauration du sommeil, le repos, la méditation, des exercices respiratoires.

Les signes d’alertes du stress

C’est bien gentil de récupérer après le stress mais ce serait mieux de le prévenir. Donc de le repérer dès les prémisses. A priori, me direz-vous, quand on est stressé on est censé le savoir. En fait, pas forcément. Ainsi l’alarme, qui porte pourtant bien son nom, n’est pas toujours prise en considération. Dès lors qu’elle est passée, et que la cause du stress a disparu, on n’y pense plus.

De même, une personne qui se plaint simplement d’une fatigue anormale peut très bien être en état de stress sans s’en rendre compte. D’où l’utilité des questionnaires de stress qui peuvent aider les médecins souvent peu au fait de ses mécanismes.

En fait, les signes d’alerte ne sont repérables à coup sûr que si vous êtes au moins arrivé au stade de la résistance. Mais quels sont-ils ? A vrai dire, ils sont très divers. Par exemple :

  • Instabilité de l‘humeur, irritabilité, traits paranoïaques inhabituels, troubles relationnels en famille ou au travail, colères subites, attitudes négatives…
  • Intolérance aux bruits, aux mauvaises nouvelles, aux frustrations
  • Troubles du sommeil, troubles digestifs ou de l’alimentation
  • Consommation nouvelle ou accrue de psychotropes, alcool ou tabac
  • Fatigue anormale, maux de tête, sentiment d’oppression, palpitations
  • Troubles infectieux fréquents, maladies de peau, eczéma…
  • Exubérance, logorrhée ou, au contraire, abattement, apathie, isolement.
  • Difficulté à se concentrer, agitation inefficace, difficulté de raisonnement
  • Difficulté à évaluer le niveau ses propres compétence ou celui des autres

Evidemment, pris séparément, aucun de ses symptômes n’est un indicateur de stress. Mais plus il y en a en même temps, plus c’est probable.

Par ailleurs, la triade anxiété-agressivité-dépression, successivement ou concomitamment, est très fréquemment corrélée au stress.

Trois cas particuliers de stress

Je vais en traiter trois : le stress chronique, le stress cumulatif et le stress post-traumatique. Je les ai à peine évoqués plus haut mais cela mérite un développement.

Stress cumulatif ou stress chronique ?

La différence

Le stress cumulatif est le résultat d’une succession de stress différents. Par exemple vous avez un accident. Puis vous divorcez. Cela vous amène à déménager. A ce moment-là votre employeur vous affecte à une filiale à 100 km de là juste au moment où un de vos enfants tombe malade…

Je ne force pas le trait. Cela peut arriver à tout un chacun.

En revanche on parle de stress chronique quand le stresseur est chronique. C’est typique du milieu professionnel. Cela concerne surtout des cadres ou dirigeants, mais aussi des aidants, des soignants, des humanitaires, des pompiers etc…

Ils prennent soin de leur entreprise ou des autres, mais n’ont pas le temps de prendre soin d’eux-mêmes. Ils font des horaires à rallonge. Ils ne se rendent pas toujours compte de leur entrée dans le stress. Mais c’est toujours le même « stresseur ».

Le point commun

Les deux ont en commun que les personnes concernées n’identifient pas les signes d’alerte. Ou bien ils les ignorent.  Et puis un jour, en plus de la fatigue physique déjà chronique chez eux, arrive la phase 3 du stress : l’épuisement total. Alors ils craquent subitement, sans préavis, du moins de leur point de vue. Ignorant les alertes, ils se dépassaient, maintenant ils sont dépassés.

Rares sont les entreprises ou les services qui se soucient de la possibilité du stress chronique chez leurs employés. Pourtant, les signes d’alerte sont plus criants que ceux du stress « ordinaire. Et leur plus forte intensité devrait attirer l’attention… Mais voilà, le stress chronique est souvent le signe d’un dysfonctionnement dans la gestion de l’entreprise. On n’a pas trop envie d’en savoir plus…

Quant au stress cumulatif en entreprise, il est évidemment plus rare. Sauf peut-être dans la phase de création de l’entreprise. Il peut y avoir des « tuiles », des choses qui ne se passent pas comme prévu. Des ruptures de contrat, des aléas économiques ou climatiques. A moins que ce ne soit un changement de législation, une augmentation de prix imprévisible, la faillite d’un client etc.

Quoi qu’il en soit, dans la littérature spécialisée, on emploie la plupart du temps les deux termes l’un pour l’autre. Cette confusion est fréquente dans la littérature professionnelle.

Le stress cumulatif ou chronique en situation de crise

Voilà un cas très spécial de stress, rarissime en entreprise industrielle. Mais très fréquent chez les pompiers, la police, les soignants ou les humanitaires notamment. Ces derniers semblent d’ailleurs intégrer petit à petit le risque de stress cumulatif ou chronique dans la gestion de leur personnel.

Ainsi, la croix rouge canadienne y est sensible et distribue à ses intervenant une sorte de questionnaire test. Il est destiné à faire le point sur leur état. La Croix Rouge de Belgique, de son côté, édite un petit opuscule à l’intention de leurs intervenants en cas de crise. Je m’en suis inspiré pour la section suivante. La Croix rouge belge s’intéresse de près à la question en raison du fait que c’est, selon son document, « la forme la plus fréquente de stress observée chez les intervenants ».

Voici les principales causes qu’elle a remontées du terrain :

  • Conditions de vie difficiles (en expatriation)
  • Charge de travail trop importante ou inactivité
  • Manque de vie sociale
  • Insécurité, risques d’agressions, hostilité de la population
  • Risques sanitaires et absence de structure médicale.
  • Exposition permanente aux souffrances des victimes
  • Exposition à des situations ou les valeurs de l’intervenant sont mises en cause
  • Etc.

Les signes d’alertes du stress cumulatif ou chronique chez l’intervenant

Selon la Croix Rouge belge :

  • Symptômes physiques : fatigue excessive, diarrhée, constipation, maux de tête, douleurs abdominales, mal de dos, troubles du sommeil, modification de l’appétit.
  • Signes émotionnels : anxiété, frustration, sentiment de culpabilité, sautes d’humeur, pessimisme ou optimisme injustifié, irritabilité, crises de larmes, cauchemars, apathie, dépression…
  • Symptômes mentaux : trous de mémoire, difficultés de concentration, rendement médiocre au travail, attitude négative, perte de créativité et de motivation, sensation d’ennui, discours intérieur négatif, paranoïa…
  • Symptômes relationnels : sentiment d’isolement, intolérance à l’égard d’autrui, ressentiment, solitude, problèmes de couple, remarques continuelles, repli sur soi, comportement antisocial.
  • Modification du comportement : consommation accrue d’alcool, de médicaments et/ou de tabac, changements dans les habitudes alimentaires ou le comportement sexuel, propension accrue à prendre des risques, hyperactivité, évitement, attitudes cyniques.
  • Perte des raisons de vivre, besoin de conforter son estime de soi.
  • Etc.

On voit que la liste des signes d’alerte du « stress en situation de crise » est bien plus longue que la liste habituelle. Mais la situation est vraiment particulière. Les intervenants partent en urgence dans un pays étranger. Ils sont dans un environnement de catastrophe naturelle, de crise sanitaire ou de guerre. C’est dangereux pour eux. Etc. La Croix Rouge parle de stress cumulatif, au regard sans doute de la variété des stresseurs.

Les militaires, même aguerris, subiraient plutôt le stress chronique. Notamment en cas de guerre longue et de forte intensité. Ou lorsque leurs positions sont précaires et au plus près du danger. Les armées en sont généralement conscientes. Pour autant, le repérage des signes d’alerte se heurte encore à la pression de conformité du groupe. En effet, il est entendu dans l’Armée qu’un soldat ne doit pas montrer ses « faiblesses »…  Cependant, il peut subir aussi un stress post-traumatique.

Le stress post-traumatique

Ce type de stress est, me semble-t-il, plus médiatisé. En raison sans doute des attentats qui ont endeuillé le pays à plusieurs reprises. En effet, le public commence à savoir ce qu’est le « post-traumatic stress disorder » ou PTSD…

On est alors face à des situations où la vie des personnes est en jeu. Par exemple : attentat, explosion, déraillement, violences sexuelles, accident d’avion, attaque à main armée, tremblement de terre, etc.

L’événement est brutal. Il n’a pas pu être anticipé. Les capacités d’adaptation de l’individu sont instantanément dépassées. Figé, hébété, il ne peut combattre ou fuir. Mais quand la compréhension survient, on a un stress aigu en différé de quelques secondes ou de quelques minutes par rapport à l’événement. De ce fait, les réactions adéquates, se mettre en sécurité par exemple, sont également décalées dans le temps.

Evidemment, la traîne émotionnelle sera plus longue. Et les réactions organiques et psychologiques se dissiperont plus lentement que dans le cas d’un accident de la route qu’on a vu venir, par exemple.

Si la personne ne sort pas de son hébétude, on parle alors de « stress dépassé ». En fait, on est alors plutôt en deçà du stress. Le stress post-traumatique viendra plus tard.

En effet, stress dépassé ou hébétude temporaire, le trauma est souvent différé. Parfois plusieurs semaines, plusieurs mois, voire plusieurs années. Le stress post-traumatique suit le même calendrier. Il peut même arriver que le trauma n’apparaisse pas. Il n’y a alors pas de stress post-traumatique non plus. La plupart du temps, cependant, il finit par se produire et c’est souvent sévère.

Cela s’explique assez bien par le fait qu’il s’agit de situations où la personne a craint pour sa vie. Et par le fait que l’intensité de l’événement a été extrême.

Symptômes spécifiques du stress post-traumatique

Il est habituel de parler « du » syndrome de stress post-traumatique. Mais il est loin d’être universel. En fait, c’est un peu comme si chacun piochait à la carte dans la liste des symptômes. Chacun se fait sa propre configuration personnelle du syndrome.

C’est évidemment une image, personne ne se fait consciemment son menu syndromique ! En fait, il est impossible de prévoir quelle forme cela prendra. Pour plusieurs personnes ayant vécu le même événement, il y aura autant de configurations que de personnes. Heureusement d’ailleurs. On imagine mal une personne qui aurait l’intégralité des symptômes listés ci-dessous… Vous allez voir que la liste est longue !

Précisons aussi que parfois ces symptômes peuvent paraître apparentés à ceux du stress « classique ». Mais vous remarquerez que la plupart sont spécifiques. Par la forme qu’ils prennent ou par leur nature. Cette spécificité est évidemment due au fait que les victimes ont dû affronter une situation pouvant leur être fatale. Mais il peut affecter aussi les proches ou les témoins.

Voici une liste non exhaustive de ces symptômes.

Les symptômes intrusifs

La plupart du temps ce sont des réminiscences de la situation traumatogène. Subitement, la victime revoit la scène. Elle réentend subjectivement les sons, les dialogues, les odeurs etc. Ces réminiscences arrivent sans signes annonciateurs, de jour comme de nuit.

Parfois elles semblent facilitées par une association avec une situation ayant un point commun avec la situation traumatique. Parfois c’est un mot dans la conversation qui évoque cette dernière par association. Mais très souvent on n’identifie pas de facteur déclenchant. Cela se produit, on ne sait pas pourquoi, c’est tout.

La nuit, des réminiscences peuvent prendre la forme de cauchemars. Il s’ensuit mécaniquement une mauvaise qualité de sommeil. Evidemment, ça n’arrange rien.

Les symptômes d’évitement.

Très fréquents, ils consistent à éviter toute situation qui pourrait rappeler de près ou de loin la situation traumatogène. Par exemple, une personne qui a vécu un déraillement ferroviaire ne peut plus prendre le train. Chaque tentative lui provoque alors une angoisse incontrôlable. Elle tremble, panique, vomit… Une sorte de reviviscence du stress.

L’évitement peut aussi concerner des lieux comme, par exemple, celui d’un accident. La personne évite systématiquement d’y repasser. Ou de revoir des gens qui étaient présents lors de cet accident. Tout se passe comme si vous vouliez absolument éviter toute chose, tout lieu ou tout personne qui pourrait vous rappeler la situation initiale.

Les symptômes émotionnels

Ils peuvent prendre des formes diverses : crises de larmes subites sans facteur déclenchant apparent; des colères inconsidérées en cas de frustration; des peurs immotivées dans des situations banales; une perte de confiance en soi, un sentiment de non-valeur etc.

À cela peut s’ajouter le sentiment de culpabilité d’avoir survécu quand d’autres sont morts. Ou encore la honte d’avoir manqué de cran. Ou de pas avoir trouvé de solution pour s’extraire ou extraire les autres de la situation.

On voit aussi parfois des personnes devenir « inaffectives ». Elles ne semblent plus vraiment connectées à la réalité. On dirait qu’elles « flottent » au-dessus des événements. Les relations familiales peuvent être largement affectées par cette sorte d’insensibilité émotionnelle. Cette absence de compassion ou d’intérêt pour les autres est déstabilisante.

A contrario, d’autres personnes vont rester en état d’alerte permanente. Elles sursautent au moindre bruit, elles exprimer peur ou angoisse pour un oui ou pour un non. Dans ces cas-là on peut constater une propension à rester confiné chez soi dans un environnement connu et rassurant.

Les symptômes cognitifs

Bien souvent, la personne s’efforce de refouler de sa conscience toute remémoration de ce qu’il s’est produit. Elle veut s’empêcher d’y penser. Avec plus ou moins de succès.

Citons aussi les difficultés d’attention et de concentration, avec les problèmes de mémoire qui en découlent. La rationalité est souvent mise à mal. On constate des difficultés à penser, à raisonner, à suivre le fil d’une idée ou d’une explication.

Les symptômes dépressifs

Statistiquement, la dépression survient environ dans un cas sur deux de stress post-traumatique. Et dans l’autre moitié des cas, des signaux dépressifs sont assez souvent repérables. Autant la configuration des autres symptômes est très variable en fonction des personnes, autant le fait dépressif semble plutôt bien partagé. A des degrés divers.

Prévention du stress, lutte contre le stress

La prévention peut être individuelle ou collective. Autrement dit, vous pouvez à titre individuel prendre soin de vous pour devenir plus résistant au stress. Vous le pouvez d’autant plus que le stress est parfois quasi-autogène. C’est-à-dire qu’alors il dépend de vous.

Le cas classique c’est le perfectionnisme. Associez-le à des délais stricts et à des interactions minutées avec les autres et vous vous fabriquerez vous-même un toboggan vers le stress…

En entreprise, l’organisation du travail et la gestion du personnel peuvent être en cause. Si c’est le cas, lorsque les conditions de travail commencent à détériorer votre efficacité et surtout votre vécu, que pouvez-vous faire ? La seule issue est de vous en extraire au moins temporairement. Ou définitivement lorsque le stresseur est un individu pervers jouissant de son pouvoir pour détruire les autres, par exemple.

Enfin, une entreprise responsable peut toujours prendre des mesures de prévention collective du stress. C’est encore peu fréquent. Mais ce type de prévention est certainement la meilleure lorsque le type de travail lui-même est potentiellement générateur de stress.

Prévention individuelle du stress autogène

Vous pouvez être à l’origine de votre propre stress. C’est le cas lorsque vous fabriquez les conditions de son apparition. Par exemple, en voulant toujours en faire trop, courir trop de lièvres à la fois. Ou bien en étant ultra-perfectionniste.

Si c’est modéré, vous êtes plus dans la fatigue que dans le stress. Des périodes de repos ou de limitation de votre activité pourraient suffire. Toutefois, l’expérience démontre que bien souvent, si vous êtes dans cette configuration, vous avez plutôt tendance à vous enfoncer qu’à vous modérer…

Dans ce cas, vous devriez certainement accepter l’aide de votre entourage. Ne serait-ce qu’en parler. Le stress isole. Communiquer avec sa famille et ses amis est un bon moyen pour avoir une meilleure conscience de la situation.

Les spécialistes considèrent d’ailleurs que la modération devrait se faire sur 3 axes.

  • L’entretien des relations sociales, familiales et affectives
  • Les activités de détente et de plaisir (sorties, cinéma, lectures, concerts, excursions, musées, rencontres d’amis, piscine, pique-niques etc.) selon vos centres d’intérêts et vos affinités.
  • L’entretien physique : activité sportive légère (on ne parle pas ici d’entraînement pour la compétition !), alimentation équilibrée et préservation du sommeil.

Tout ce dont vous vous privez…

Et puis, il existe des techniques anti-stress actives. Par exemple le training autogène, la méditation dite « de pleine conscience » voire le yoga, et… des exercices respiratoires. Ces derniers ont probablement le meilleur rapport facilité / efficacité.

Il existe même une petite application pour smartphone qui vous permet de faire ces exercices de façon fiable en 5 minutes chrono. Si vous pouvez les faire plusieurs fois jour c’est encore mieux. Étonnamment, ces exercices simplistes font baisser votre taux de cortisol ! Vous trouverez le lien dans cet article (chapitre cohérence cardiaque).

Prévention individuelle du stress au travail

Dès que le stress pointe le bout de son nez au travail, il faut oser demander un arrêt de travail bien avant d’être au bout du rouleau. En général les personnes concernées attendent trop longtemps. En cause, le sentiment de responsabilité. Ou la culpabilité d’augmenter la charge de travail des collègues. Et puis aussi la crainte de représailles de la hiérarchie. Sans compter la difficulté à justifier la demande devant le généraliste parfois peu au fait de ce qu’est le stress, etc.

Le résultat, c’est que les arrêts de travail tardifs ne permettent pas de vous remettre complètement. Vous reprenez le travail avec une traîne de stress non dissipée. Et un jour ou l’autre, vous devrez vous résoudre à un autre arrêt de travail. Puis, plus tard, à un autre arrêt. Etc. Et ceux-ci vont se rapprocher dans le temps jusqu’au moment du « burn out ».

Il faut savoir que certaines entreprises n’hésitent pas à organiser la gestion du personnel pour que le stress survienne. Pour que les employés s’en aillent… Mieux vaut tenter tout de suite une rupture conventionnelle ou démissionner si c’est possible. Il ne servira à rien de tenter de résister.

Ce que je veux dire c’est que la meilleure protection contre le stress organisé à votre encontre, c’est la fuite. Il n’y a rien de honteux à cela. Le médecin du travail peut être d’une aide précieuse sur ce plan. On ne peut pas discuter une prescription du médecin du travail.

En attendant, les 3 axes indiqués ci-dessus permettront jusqu’à un certain point de limiter les effets du stress. A condition de les mettre en œuvre avant d’avoir passé le point de non-retour.

La prévention collective du stress au travail

Elle est du ressort des entreprises ou des organisations (pompiers, armée, associations humanitaires etc.). Toutefois, on ne leur demande pas tant de donner des conseils de prévention que d’avoir une politique globale de gestion du stress.

Cela suppose qu’il soit reconnu dans l’entreprise comme un risque. Ou même comme une composante assumée de la nature du travail. Notez que la réglementation en France a instauré en 1991 une « obligation générale de sécurité ». Elle inclut la prévention du stress au travail au même titre que la prévention des accidents ou des maladies du travail.

Identification des facteurs de stress au travail

Bien sûr, cette prévention suppose une identification des facteurs de stress.

L’INRS (l’Institut Nationale Recherche et Sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles) préconise un groupe projet (bonjour le jargon). Ce dernier est composé de salariés volontaires, de membres du CSE (le Comité Social et Économique qui remplace aujourd’hui le Comité d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail) et du médecin du travail.

À charge pour ce groupe de collecter les données par les moyens les plus adéquats: entretiens, questionnaires, collecte des cas déjà avérés, analyse des statistiques d’accidents du travail, de l’absentéisme, des congés maladie, du « turnover », enquête sur l’ambiance au travail etc.

Mise en œuvre de la prévention

Lorsque des facteurs de stress sont identifiés, le « groupe projet » fait des recommandations. Mais la mise en œuvre de la prévention est de la responsabilité de la direction.

Les principales mesures du plan d’action tourneront souvent autour de choses telles que :

  • Modification de l’organisation du travail (par exemple plus de travail d’équipe et moins de travail solitaire)
  • Participation des salariés aux décisions ayant des effets sur leur conditions de travail
  • Ajustement des tâches à la hausse ou à la baisse au regard des compétences des employés (éviter qu’elles soient dépassées ou sous employées).

Au-delà de ces mesures générales, d’autres mesures « anti-stress » spécifiques peuvent répondre à des problèmes spécifiques. Par exemple, dans le cas d’une organisation humanitaire sur un théâtre de guerre faisant de nombreuses victimes et mettant la vie des intervenants en danger.

En pareil cas, des débriefings collectifs réguliers peuvent aider chacun à prendre de la distance. Et au collectif de repérer les collègues en train de s’engluer dans le stress. C’est là un moyen spécifique pour faire face à une situation spécifique.

Dans des cas moins impactant, en l’absence de danger physique et de confrontation aux malheurs des autres, des mesures spécifiques peuvent également s’imposer Par exemple, imaginez le cas de Pôle Emploi quand le personnel est assailli par des usagers mécontents, voire violents. L’absence de dispositif spécifique d’aide ne serait pas conforme à la réglementation.

Mais voilà : combien d’entreprises font cette démarche ? Combien d’entreprises ont un plan d’action sérieux sur le plan de la sécurité ?  Combien d’entreprises y intègrent le risque de stress ?

Il y a encore des progrès à faire.

La prévention du stress post-traumatique est-elle possible ?

A priori, l’idée de prévention en la matière paraît farfelue. En effet, les événements potentiellement traumatisants sont absolument imprévisibles. L’impossibilité d’anticiper l’événement ne permet donc pas à l’organisme et au psychisme de se préparer.

Alors quand l’événement survient ce serait trop tard ? Non. N’oubliez pas que le traumatisme n’est pas immédiat. Le consensus actuel, c’est qu’on pourrait empêcher son apparition si l’on agit dans les 72 heures (délai réduit à 24 ou 48 h chez certains auteurs) grâce au débriefing psychologique. Et si l’on peut empêcher le traumatisme… il n’y aura pas de syndrome de stress post-traumatique.

Il n’empêche que ce type de prévention est une prévention… post événement. Pourrait-on imaginer un moyen précoce d’éviter le PTSD au cas où se produirait dans le futur un éventuel événement traumatique ? Ne serait-ce pas encore mieux ? Est-ce que c’est si farfelu que ça ?

Peut-être… ou pas !

Mais on entre alors dans la question de la prévention par le mode de vie. Un domaine peu compris et peu crédible – à tort – aux yeux de beaucoup. Appelons cela la prévention précoce…

Prévention précoce

Les scientifiques s’accordent sur le fait qu’il existe des « modérateurs du stress ». Ceux-ci ont pour effet de limiter l’intensité du stress quand il survient. Ces modérateurs sont souvent constatés mais rarement voulus ou mis en place par les intéressés. Il est donc difficile de parler de prévention stricto sensu. Il reste en revanche possible de les préserver ou de les améliorer.

Trois modérateurs semblent tenir la corde : le soutien social perçu, le niveau de stress perçu et la possibilité de contrôle perçu. Cela demande quelques explications :

Le soutien social perçu

Il est courant de dire, et je l’ai moi-même écrit, que les relations familiales, amicales, sociales, permettent de tenir le stress à distance. C’est une facilité de langage.

En fait, ce qui compte c’est l’impression que vous en avez. Si vous considérez (à tort ou çà raison, peu importe) que ces relations sont sans importances et ne vous seraient d’aucune aide en cas de difficulté, cela n’aura pas d’effet préventif.

Inversement, si vous êtes persuadé que votre entourage sera sensible à vos possibles difficultés alors tout change. Vous serez moins sensible au stress… Et cela, même si vous trompez du tout au tout sur la disponibilité de votre famille, de vos amis ou de vos collègues !

Ce qui compte, c’est la perception que vous en avez. Il peut donc arriver que vous soyez très peu « stressable » tant que vous en avez une bonne perception. Et vite stressé si, des difficultés étant survenues, vous vous rendez-compte que le soutien n’est pas au rendez-vous.

Le niveau de stress perçu

Là-aussi, tout est affaire de perception. A la différence près qu’on dispose d’outils pour mesurer l’intensité du stress. Et il est facile de constater que les évaluations du niveau du stress (selon des composantes objectives de gravité, d’intensité, de fréquence ou de durée) sont rarement corrélées avec l’état de stress observable chez les personnes.

Ainsi Unetelle ne manifeste pas de stress observable malgré un stresseur de haute intensité. Une autre, si. Encore une autre est en alarme pour un stresseur de basse intensité. D’autres, non.

Cependant, si on leur demande d’évaluer elles-mêmes, spontanément, leur niveau de stress, leurs évaluations sont souvent cohérentes avec l’observation clinique.

A noter que la découverte d’une absence de soutien là l’on en attendait un augmente ensuite le niveau de stress perçu. Est-on alors plus stressé que si on n’avait jamais attendu de soutien? On n’a pas la réponse à cette question.

Le contrôle perçu

Il est question ici de l’évaluation que la personne fait des difficultés et de ses capacités à les affronter. Savoir qu’on dispose des capacités à faire face modifie la sensibilité émotionnelle. Cela permet ausi une analyse plus rationnelle de la situation. Cela donne confiance en soi.

Non pas une confiance en soi « de principe ».Mais une confiance en soi spécifiquement pour faire face à une situation bien précise. Elle peut donc survenir chez une personne ayant peu confiance en elle-même en général mais tout à fait confiante dans cette situation particulière.

Inversement on a pu constater que la survenue d’un état de stress post-traumatique est plus fréquente chez les anxieux. C’est cohérent avec le fait que ceux-ci ne s’imaginent pas en capacité de faire face. Au contraire, ils anticipent les impossibilités. 

En matière de contrôle perçu, la découverte par des personnes a priori confiantes de capacités moindres qu’anticipées conduit évidemment ensuite à une augmentation globale du stress perçu.

Mais une prévention active est-elle possible ?

Autrement dit peut-on par son action créer de toutes pièces des modérateurs ? Le troisième modérateur semble un bon candidat. Même s’il repose sur une évaluation positive de ses capacités dans une circonstance spécifique. En effet, on est tout de même dans le domaine de la confiance en soi. Et quelqu’un qui a globalement confiance en lui-même sera plus enclin à projeter cette confiance sur des situations spécifiques.

Dès lors, cultiver sa confiance en soi ou apprendre à avoir confiance en soi (si, si, c’est possible, on verra ça bientôt) peut donc entrer dans la prévention. Mais bon, c’est un peu tiré par les cheveux.

Par ailleurs il existe des moyens de prévenir le stress classique on l’a vu plus haut. Mais pour le stress post traumatique ? Comment envisager une prévention avant un événement statistiquement rare, imprévisible, mais possiblement générateur d’un traumatisme qui sera différé dans le temps ?

C’est pourtant une interrogation concernant des professionnels particulièrement exposés. Citons, en vrac, les militaires, les transporteurs de fonds, les pompiers, les « humanitaires », les policiers, ou encore les facteurs qui, dans certains pays, transportent encore l’argent des mandats par exemple.

Exemple des militaires

La notion de stress post traumatique est apparue historiquement dans l’Armée. A propos des soldats incapables de retourner au combat après avoir subi le feu de l’adversaire. Et cela même si le soldat n’a pas été touché. C’est pourquoi sans doute, sous Napoléon, on parlait du syndrome du « vent » du boulet.

Inutile de dire que c’était mal vu. Le soldat ne serait-il pas un couard ? Et puis cela diminuait l’effectif. D’où la réexpédition rapide au front du « récalcitrant ». Sans succès… Alors, petit à petit les psychiatres militaires ont dû se rendre à l’évidence. C’était du sérieux.

Prise de conscience du problème

Mais la vraie prise de conscience contemporaine est surtout venue de l’engagement de troupes françaises en Afghanistan. Il faut dire que 80 % des cas de stress post-traumatique concernent des militaires qui sont allés en mission dans ce pays !

Depuis, l’Armée semble avoir mis en place un arsenal préventif. Je dis « semble » parce qu’il s’agit surtout de prévenir le PTSD au retour d’opération.  Ainsi existe-t-il une Cellule d’Intervention et de Soutien Psychologique de l’Armée de Terre. On a mis aussi en place un « sas de décompression » en fin de mission, généralement en hôtel.

Au programme : de l’activité physique, des massages, des entretiens avec des psychologues, et des TOP… soit des « techniques d’optimisation du potentiel ». Il s‘agit d’exercices de respiration contrôlée, de relaxation ; d’imagerie mentale et de « dialogue interne ».

Mais on trouve dans les documents de l’Armée une définition des TOP comme « méthode de préparation pour mobiliser au mieux ses ressources physiques et psycho-cognitives ». Les TOP pourraient donc être utilisées avant et en cours de mission ? En ce cas, on pourrait parler de prévention précoce, si cela diminue effectivement le taux de syndromes post-traumatiques ensuite.

Est-ce le cas ?

Les résultats

On a peu d’informations sur les résultats. Un rapport parlementaire de 2015 pointait d’ailleurs leur insuffisance. Le ministre de la Défense répondait que depuis 2011 il y avait eu 3 plans successifs pour « prévenir les éventuelles conséquences du stress opérationnel ». Et qu’il existe au sein des unités des référents « environnement humain ». Bonjour le jargon, les guillemets sont d’origine…

Ces informations sont vagues. Le ministre indique également que ces plans ont aussi pour but de « prendre en charge les troubles psychiques post-traumatiques. Mais ce n’est pas de la prévention.

L’impression que je ressens, c’est que l’Armée a encore du mal à intégrer la question du stress post-traumatique. Elle parle d’ailleurs de « stress opérationnel » comme elle parlerait du débriefing opérationnel. Ce dernier est un grand classique dans l’Armée.

Il s’agir du bilan d’une opération, du repérage de ce qui s’est bien ou mal passé. Le but est de prévoir des actions correctrices ou de ne pas répéter les erreurs les fois suivantes. Il pourrait être intéressant de le doubler par un débriefing psychologique systématique. Et cela, quand bien même tout se serait bien passé et sans stress intense.

Cela permettrait de s’habituer à partager des ressentis, des hésitations, des émotions etc… Toutes choses qu’on ne se permettrait pas d’évoquer en débriefing opérationnel. Il faudrait donc que ce débriefing émotionnel, soit piloté hors hiérarchie. Ce qui supposerait d’embarquer des psychologues ou des médecins civils tenus au secret professionnel vis-à-vis de la hiérarchie militaire.

Ce n’est certainement pas le cas des référents « environnement humain » qui d’ailleurs n’interviennent qu’après le débriefing d’opérations connotés par du stress de haute intensité. Ce n’est donc pas de la prévention et je reste perplexe quant à la prévention du stress dans l’Armée.

Exemple des humanitaires

Le Comité International de la Croix Rouge met en avant son programme « stress et soutien du personnel ».

« Il vaut la peine, écrit le responsable du programme, de mieux prendre soin des soignants ». Pour cela il faut proposer « un débriefing émotionnel de groupe chaque fois que c’est possible ». Il souligne que les employés et bénévoles travaillent souvent en environnement hostile et parfois violent. Il note que c’est souvent sans expérience préalable de telles situations.

Le programme comprend donc une « phase de préparation et de formation » avant le départ. La nature du soutien en cours de mission n’est pas précisée. En revanche le texte inclue un tableau des « situations nécessitant un débriefing émotionnel collectif ».

Il y est question de blessés graves ou de décès de collègues, de kidnapping, viols, massacres ou catastrophe à grande échelle… Egalement de « surcharge professionnelle grave dans un contexte menaçant… Ce qui laisse penser à un débriefing post événement.

Mais je lis ensuite que « le débriefing voudrait (c’est moi qui souligne) être une mesure de routine. Elle devrait faire systématiquement suite  » à tout événement, ou à toute situation, à haute charge émotionnelle, survenant sur le terrain ».

L’auteur voudrait « l’institutionnaliser de façon incontournable après incident critique survenu en mission ». On sent bien, à le lire, que ce n’est pas le cas ! Visiblement, on ne le fait que pour les événements les plus graves, consignés dans le tableau. D’ailleurs il précise que ce sont « les rescapés » qui sont « conviés » au débriefing ! Le seuil de déclenchement du débriefing est difficile à attenindre…

C’est décevant, et force est de constater que la prévention précoce continue n’est pas non plus à l’ordre du jour de la Croix Rouge.

Conclusion sur la prévention du stress post-traumatique

La prévention du stress post-traumatique est-elle possible ? On peut légitimement avoir des doutes. Mais en fait on n’en sait rien, faute d’expérimentation réelle de ce que j’appellerais volontiers une prévention précoce continue.

Je sais bien que la notion de prévention avant l’événement potentiellement traumatique fait irrépressiblement penser à ce maire rural… Vous savez, celui qui avait été échaudé par le dysfonctionnement de la pompe lors d’un incendie. Il avait pris un arrêté radical : la pompe à incendie devra être vérifiée… la veille de chaque incendie !

Trêve de plaisanterie, il vaudrait la peine que des débriefings psychologiques, ou émotionnels comme on dit à la Croix Rouge soit systématisés. Même après des retours de mission sans tension notable. Si cela était fait dans les métiers à risques, on saurait au bout de quelques années si cela fonctionne.

Il faudrait, certes, une méthodologie commune. Il faudrait constituer une sorte d’échelle de Richter du risque traumatogène. On pourrait alors coter chaque opération ou mission faisant l’objet du débriefing. De même, il faudrait consigner le taux d’incidence du PTSD en fonction de la cotation du risque traumatogène.

Et puis, bien entendu, il faudrait comparer les statistiques obtenues avec celles de groupes témoins qui ne pratiqueraient pas cette prévention continue. Mais ensuite nous serions fixés. Cette étude n’est possible que dans des organisations à risques et à gros effectifs. Ces organisations ont généralement à la fois une direction centrale et de multiples unités. Cela rend possible que certaines suivent le protocole préventif et d’autres non. C’est la condition sine qua non pour faire une étude sérieuse.

En attendant, nous n’avons aucune certitude sur le fait qu’une prévention du stress post-traumatique soit possible.

Alors, peut-on se débarrasser du stress ?

Résumé de la situation:

Nous avons vu qu’il est tout à fait possible de devenir moins « stressable ». C’est déjà vrai pour le stress ponctuel. Même d’assez haute intensité, mais ponctuel. Ceux qui ont un mode de vie anti-stress depuis longtemps absorberont mieux également les situations stressantes cumulées. Pour eux elles seront psychologiquement métabolisables, si j’ose dire.

Pour le reste, il semblerait que l’être humain soit capable de trésors d’auto-duplicité pour se voiler la face. Dans le genre :« Je suis seulement un peu fatigué, j’ai beaucoup de travail. On manque d’effectif et il faut bien qu’on fasse le boulot. Je vais me resourcer pendant les vacances. Mas oui, ça va, c’est temporaire. Je dors un peu mal mais ça va s’arranger, ça n’a aucun rapport. J’ai des maux d’estomac mais ça doit venir de ce que j’ai mangé. ». Etc.

C’est insidieux. Même avec un mode de vie « préventif » vous pouvez vous laisser prendre dans cet engrenage… La pente est douce, on ne se rend pas compte. Certes, votre situation sera meilleure que si vous n’aviez rien fait en amont. Le stress chronique sera certainement plus tardif. Mais pas sûr que son intensité sera moindre.

Pour le stress post-traumatique, je ne compterais pas sur le mode de vie anti-stress… Est-ce que ça amortirait le choc ? Nous n’avons aucune donnée observable en ce sens. La soudaineté et la forte intensité qui caractérisent les situations susceptibles de le générer ont un effet dévastateur. Cela déborde toute possibilité d’adaptation.

Aucune anticipation possible. Cela ne ressemble à rien de connu. L’événement est à part, aucune compréhension de quoi que ce soit ne circule dans le psychisme. Dans ce dernier, c’est comme une bulle autonome, une inclusion reliée à rien.

Les leçons à en tirer

Il va falloir se faire une raison. La prévention aura peu ou pas d’effet si on ne repère pas le glissement dans un stress cumulatif retardé. Et certainement aucun effet sur l’effet différé après une situation potentiellement traumatogène.

Il va donc falloir aborder la question du traitement. Si le stress est là, peu importe qu’il ait pu être retardé par un mode de vie préventif. Il est quand même là. Alors, comment s’en débarrasser ?

Quelles sont les méthodes efficaces contre le stress avéré ?

Pour les cas les moins impactants, il existe des moyens simples et facile à mettre en œuvre. Paradoxalement, c’est ce qui les rend difficilement crédibles. Surtout aux yeux des personnes concernées.

Souvent, ce sont des personnes anxieuses. Et le fait est que l’anxiété peut être un effet d’un stress non reconnu. Parfois aussi, il s’agit d’un manque de confiance en soi. Il peut être assez fort pour rendre stressante la vie sociale ou professionnelle. Alors on est anxieux dès que survient un « risque de relation ». Pour ces cas-là également, il existe des moyens simples et faciles à mettre en œuvre

Dans le cas du stress cumulatif ou chronique, ces mêmes moyens seront des adjuvants précieux. Mais ils ne suffiront pas. Des changements profonds dans le quotidien deviennent indispensables. Cela n’est pas difficile en soi. Mais les résistances au changement et l’entêtement fréquent des personnes dans cet état rend parfois leur mise en œuvre trop lente.

Enfin, si l’on a affaire au stress post-traumatique, ces mêmes moyens sont une base d’hygiène de vie. Mais le stress post-traumatique demande un traitement spécifique. Il en existe en fait plusieurs dont l’efficacité n’est pas toujours aussi établie qu’on le voudrait. Mais ils existent.

C’est le moment de faire le point sur tout cela.

Se débarrasser de la traîne d’un stress aigu

Ce stress lui-même ne dure pas. La traîne, possiblement si. Les moyens de la dissoudre sont d’une simplicité biblique. Et pourtant, ils marchent très bien. Le premier, très basique, consiste à… s’éloigner des sources de stress. Ensuite vous avez les 3 axes de modération que nous avons déjà vus. Voyez plus haut au chapitre de la prévention individuelle.

Ce n’est pas parce qu’ils sont préventifs que ces moyens n’auraient pas d’intérêt une fois la traine du stress installée. Au contraire, il convient alors de lisser au maximum les aspérités de la vie quotidienne. Sinon, celles-ci auront tendance à nourrir le stress.

Pour rappel, les bases

  • Entretenir ses relations sociales, familiales, affectives
  • S’accorder de la détente, des activités de plaisir
  • S’entretenir physiquement, s’alimenter équilibré et bien dormir.

En cas de longue traîne, il est probable que vous ne pratiquez pas ces bases… Donc, commencez par là.

Les techniques anti-stress actives.

Elles aussi sont autant curatives que préventives. SI vous ne les pratiquez pas, c’est le moment de vous y mettre. Il s’agit de :

  • Pratiquer une méthode de relaxation. Training autogène ou sophrologie. Mieux vaut pratiquer en groupe avec un coach. Ça va plus vite. Sinon, vous allez tâtonner.
  • Pratiquer la cohérence cardiaque. Je trouve très bien l’application « Respirelax + » pour smartphone. Vous trouverez le lien dans l’article indiqué plus haut, au chapitre prévention individuelle.

Cette dernière est un petit bijou de facilité et d’efficacité. Si vous ne deviez faire qu’une seule chose, que ce soit celle-là. Pensez-donc : vous devez juste respirer au rythme d’une bulle qui monte et descend sur l’écran de votre téléphone. Rien d’autre à faire. La bulle monte ? Vous inspirez. La bulle descend ? Vous expirez.

C’est tout ?

Oui, mais votre taux de cortisol a chuté pendant l’exercice ! Le cortisol c’est l’hormone du stress. Sans cortisol, vous n’êtes plus stressé. C’est pourquoi ces 5 minutes de Respirelax sont autant préventives que curatrices. Et l’effet anti-stress peut durer plusieurs heures. Si j’étais médecin, je vous ferais une ordonnance de Respirelax matin, midi et soir !

Les moyens anti-stress simplissimes

J’ai évoqué plus haut des moyens simples et faciles. Vous voyez que c’est le cas. Je disais aussi que leur simplicité les rend peu crédibles aux yeux des personnes anxieuses. Ce sera encore plus le cas pour ce qui va suivre. Pourtant c’est très sérieux. Il y a des expériences scientifiques qui prouvent leurs effets positifs sur le stress. Par exemple :

Avoir un chat
  • Vous commencez à douter de mon sérieux ? Pourtant les statistiques sont formelles. On constate 30 % de crises cardiaques en moins chez les possesseurs de chats. La célèbre clinique Mayo constate aussi que 41 % des personnes ayant un animal ont un meilleur sommeil. D’autres études montrent que si vous caressez un chat, votre tension baisse, votre rythme cardiaque se régularise… Et votre taux de cortisol baisse ! Si le chat ronronne, la fréquence du ronronnement vous fait même secréter de la sérotonine. C’est-à-dire l’hormone anti-stress par excellence.

Pensez qu’adopter un chat vous engage à en prendre soin. Il faudra s’occuper de lui. Ces moments-là seront vos médicaments anti-stress. Si vous comptez sur la seule présence du chat et que vous laissez les autres s’en occuper, n’en espérez rien.

Vous oxygéner
  • On peut démontrer en laboratoire qu’un cerveau bien oxygéné est plus rationnel qu’un cerveau mal oxygéné. De ce fait l’oxygénation réduit les dissonances cognitives. Or, dans l’anxiété et le stress il existe une dissonance cognitive. Par exemple, vous êtes stressé à l’idée de rencontrer une souris quand vous allez à la cave. Rationnellement vous savez que vous ne risquez rien. Mais émotionnellement vous avez peur et ça vous stresse d’avance. C’est dissonant. Oxygéner votre cerveau ne va pas vous faire idolâtrer les souris. Mais le stress par anticipation diminuera.

S’oxygéner ne veut pas dire faire du sport. Si vous en faites c’est très bien. Mais marcher ou faire du vélo d’appartement c’est tout aussi bien. Dans tous les cas il suffit d’atteindre un léger essoufflement pour être en régime d’oxygénation. Faire un maximum de choses à pied chaque jour, à bonne cadence, est probablement la formule la plus simple.

Je serais très étonné que votre traîne de stress puisse résister à un cocktail de ces moyens. Vous pouvez pratiquement vous servir à la carte. En les pratiquement vraiment, oui vous pouvez vous débarrasser d’une traine de stress facilement.

Pas vraiment de traitement du stress aigu

Comme vous l’avez compris, ce type de stress est temporaire, pour ne pas dire ponctuel. Contrairement aux autres types de stress, il laisse peu ou pas de traces. Il serait exagéré de parler de traitement pour le stress aigu. Cela se justifie juste un peu pour la traîne. Mais c’est simple. Un peu d’activité physique et de relaxation, cohérence cardiaque et basta, ça suffit bien.

Se débarrasser du stress cumulatif

Là, on monte sérieusement d’un cran dans « l’échelle de Richter du stress ». Si vous avez accumulé du stress, la première chose à faire, c’est une grosse vidange. Reprenons l’exemple donné au début de l’article. Vous avez eu un accident, vous avez divorcé et déménagé. Là-dessus, votre employeur vous envoie en poste ailleurs. Puis, vous apprenez qu’un de vos enfants vient d’avoir un accident etc.

Comment vidanger tout ça ? Mieux vaut commencer avant de craquer. Par rapport au stress cumulatif, il y a une différence de taille : vous ne pouviez pas vous soustraire aux situations stressantes. Vous avez subi successivement plusieurs expériences de stress. Et ce qui est fait est fait. Vous avez été accidenté. Vous avez divorcé. Vous avez déménagé deux fois. Un de vos enfants a été accidenté. Vous ne pouvez pas vous retirer de ça.

En principe chaque expérience, si elle avait eu lieu seule, aurait généré UN état de stress aigu. La traine de ce dernier se serait dissoute avec le temps ou avec les petits (mais efficaces) moyens de la section ci-dessus. Ce qui pose problème, c’est le fait qu’un second événement stressant soit arrivé alors que le stress précédent n’était pas dissous. Puis un troisième dans des conditions similaires. Etc.

Il faut faire l’hypothèse que la série est terminée ! Ensuite s’attaquer à votre mode de vie. Agir sur le plan physique et sur le plan psychologique. Et il y a un troisième aspect, souvent délaissé : celui des ressources mentales et émotionnelles.

Attention ce n’est pas aussi tranché. Physique, psychologique, mental et émotionnel s’interpénètrent. Mais ce qui est favorable pour l’un l’est souvent pour les autres. Ces catégories ne sont pas étanches ! Certains moyens figurent donc dans plusieurs catégories.

Actions sur le plan physique

Il s’agit essentiellement de ne pas tirer sur la corde et de limiter les causes de fatigue physique. Tout est bon pour cela. Par exemple :

  • Déjeunez à proximité de votre lieu de travail au lieu de perdre une heure aller-retour pour déjeuner chez vous.
  • Si votre travail est physique, faites toutes les pauses auxquelles vous avez droit.
  • Hydratez-vous très régulièrement.
  • Ne faites pas plus que vous ne pouvez.
  • Si c’est trop limite allez voir le médecin du travail qui pourra vous mettre à mi-temps thérapeutique.
  • Accordez-vous un calendrier plus long pour remettre vos affaires en ordre après votre déménagement.
  • Faites des exercices respiratoires avec Respirelax.
  • Couchez-vous le soir juste un quart d’heure avant le début d’un cycle du sommeil. Repérer le début d’un cycle est facile : c’est quand vous mettez à bailler ou quand vous ressentez un coup de pompe. Chaque cycle dure environ 1 h 30. Si ça vous arrive au travail, rajouter à l’horaire autant de fois 1 h 30 qu’il faut pour obtenir un horaire de coucher adéquat.

Actions sur le plan psychologique

  • Laissez tomber pour un temps vos réseaux sociaux et recentrez-vous sur votre remise en forme. Ne communiquez qu’avec la famille, les amis et les personnes positives.
  • Nouez des relations dans votre nouvel environnement ou au travail.
  • Dès que vous pouvez, invitez-les pour un pot ou un apéritif dinatoire. Ne faites rien de compliqué : salade, assiette de charcuterie, par exemple. Ne cherchez pas à dissimuler que vous n’êtes pas encore bien installé. Tout le monde comprendra.
  • Utilisez le temps gagné par le réaménagement de votre calendrier d’installation pour aller marcher dans un parc ou dans les bois si vous avez cela à proximité. Oxygénez-vous.
  • Faites des photos, engagez la conversation avec les personnes que vous rencontrez.
  • Si vous ne partez pas en déplacement adoptez un chat (voir plus haut). Si c’est un chaton sevré, vous pouvez même l’habituer à voyager en voiture (en panier fermé !). S’occuper d’un animal est un excellent dérivatif mental en plus d’être anti-stress.

Actions sur le plan mental

  • Couchez par écrit dans un cahier ce que vous avez réussi à faire de positif depuis le premier stress. Datez.
  • Ayez un agenda pour les choses à faire dans la semaine. Si vous n’en avez fait que la moitié reportez-les la semaine suivante et ne rajoutez rien d’autre. Ne faites des projets au-delà d’une semaine que lorsque vous serez réaliste sur ce que vous pouvez faire effectivement.
  • Notez et datez ce qui est fait dans votre cahier. Vous pouvez aussi avoir un second agenda plutôt qu’un cahier. Vous aurez donc un agenda des choses à faire et un agenda des choses déjà faites.
  • Occupez-vous d’un animal. C’est un excellent dérivatif mental et pas seulement un anti-stress.
  • Trouvez-vous une activité non stressante capable de vous empêcher de penser à autre chose. Peu importe laquelle : faire de l’aquarelle, lire des biographies, vous inscrire dans un club de pétanque, intégrer un groupe de conversation en langue étrangère etc.
  • Quand vos pensées sont décousues ou ruminantes focalisez-vous sur une seule chose, et revenez-y constamment malgré les pensées parasites. C’est un exercice contre la dispersion de l’attention.

Actions sur plan émotionnel

  • Quand le stress ou l’anxiété revient en force, écrivez ce que vous ressentez très exactement. Ensuite réécrivez-le en supprimant tous les adjectifs et tous les adverbes. Il vous restera la description des faits, expurgée de la description de vos émotions. Vous obtenez alors une réévaluation cognitive de la situation. Très utile en cas de conflit, notamment après une séparation. Cela vous amène à voir les choses de façon plus objective.
  • Mettez un nom sur vos émotions. Colère, peur, ressentiment etc. Les nommer permet de prendre du champ.
  • Pratiquez une méthode de relaxation. Si vous le faites le soir dans lit, il est très possible que vous vous endormiez. Et alors ? C’est parfait !
  • Contrôlez votre respiration régulièrement. Que vous soyez stressé, anxieux ou temporairement zen, cela n’a pas d’importance. Le plus simple est de se focaliser sur le trajet de l’air dans vos poumons quand vous inspirez et quand vous expirez. Faites une respiration « basse » qui gonfle et dégonfle votre abdomen plutôt que le haut de vos poumons. C’est plus efficace.
  • Utilisez l’application « Respirelax + », vous pouvez le faire dans le métro ou dans une salle d’attente ou même à la cantine avant ou après le repas. Personne ne trouvera bizarre que vous ayez le nez dans votre mobile…

Comment mettre tout ça en œuvre ?

D’abord les moyens à effet rapide

Attention, il ne s’agit pas de pratiquer tout le catalogue ! D’autant que les moyens indiqués pour le traitement de la traîne de stress sont valables aussi. À ceci près qu’ils sont insuffisants contre le stress cumulatif. Au total ça fait beaucoup…

En toutes choses il faut donc raison garder. Le cocktail de techniques les plus adapté dépend de chacun. Il dépend aussi de la situation et de l’intensité du stress. Il est impossible de faire une « ordonnance » à distance. Il vous incombe donc de faire votre programme en fonction de votre état et de votre situation.

Évidemment il y a des méthodes plus généralistes que d’autres et qui devraient se trouver dans chaque cocktail. Par exemple, selon moi : les pauses, la préservation du sommeil, les exercices de respiration type Respirelax. C’est un bon point de départ et vous pouvez le faire immédiatement. Et, surtout, les effets seront immédiats aussi. À poursuivre non seulement pendant votre retour à la normale mais également ensuite, à titre préventif.

Et puis les moyens de fond

Et puis aussi le recentrage sur vous-mêmes, la (re)constitution d’un réseau relationnel positif, tenir le compte de ce que vous avez réalisé, vous octroyer des petits plaisirs. Sans oublier la réévaluation cognitive… Là, ce sont des actions « de fond » à mener sur des mois.

Ce sont les bases de votre rééquilibrage sur les quatre plans que j’ai indiqués. Mais ne faites pas tout à la fois. À vous de trouver le bon rythme, petit à petit. D’abord le premier train de mesures. Et, puis au bout d’une semaine ou deux le second train. Au bout d’un mois, dès que tout sera devenu une routine, vous pourrez aller piocher dans l’arsenal. A la carte, selon votre situation.

A priori, si votre psychologie de base est bonne, vous devez pouvoir vous en sortir tout seul. Soyez conscient du facteur temps. Il fait partie du processus de retour à la normale. Que cela vous paraisse long n’aurait rien d’étonnant. Mais vous vous rendrez compte que vous êtes sur la bonne voie assez facilement : dès que vous retrouverez de l’allant. Et surtout lorsque vous serez capable de « regarder vos émotions passer » sans qu’elles ne vous envahissent.

Toutefois, si ces stress accumulés sont tombés sur vos fragilités psychologiques, ça ne vous suffira pas. Vous aurez besoin d’une aide extérieure. Dans ce cas, la bonne décision c’est de consulter un psychologue. Vous aurez sûrement besoin de « faire un travail sur vous » comme on dit aujourd’hui. Ce sera le cas si, malgré le programme que vous avez concocté, vous vous sentez déprimé ou même simplement découragé face aux difficultés. Notamment. Mais quelque soit le cas, n’hésitez pas à consulter.

Traitement du stress cumulatif.

Le cumul des stress est quelque chose de spécifique. Toutefois il n’existe pas de protocole de traitement spécifique pour le stress cumulatif. Cela peut paraître curieux. Mais il est vrai que ce n’est pas le plus fréquent. Cela peut expliquer un moindre intérêt des spécialistes.

Pourtant, dans les cas les plus graves, les effets du stress cumulatifs peuvent devenir similaires à ceux du stress post traumatique. C’est le cas lorsque les stresseurs sont « presque traumatogènes ». Du moins pris individuellement. Alors, en avalanche…

J’ai ainsi connu une personne qui a subi 4 deuils en moins d’un an. D’abord l’assassinat de son mari. Elle n’en a pas été témoin. Il y a eu les symptômes classiques du deuil : douleur de la perte, dépression de l’humeur, colère et chute des défenses immunitaires.

Le stress s’y est ajouté. Il est venu des relations familiales difficiles, des difficultés d’organisation des obsèques et de l’absence d’aide et de soutien. Là aussi, il y a eu des symptômes classiques. Insomnies, maux de ventres, palpitations, nervosité et hypersensibilité au bruit.

Le tableau clinique était donc très mêlé. Mais pas de signes traumatiques. Les autres décès, un ami et deux personnes dans la famille se sont échelonnés sur 10 mois. A cette échéance-là la symptomatologie est devenue très proches de celle du stress post-traumatique : sursaut, cauchemars, réminiscences des évènements, crises de pleurs sans prodromes.

J’admets que le cas est un peu hors normes, mais cela nous dit quelque chose de l’effet possible du cumul des stress. Donc, de deux choses l’une :

  • Vous avez des symptômes de fatigue, d’épuisement, sautes d’humeur, trous de mémoire. Fiez-vous aux actions et moyens évoqués ci-dessus.
  • Vous avez des symptômes de type post-traumatique : consultez alors la section consacrée au stress post-traumatique.

Se débarrasser du stress chronique

Du point de vue des moyens pour en sortir, y a-t-il une grande différence entre le stress cumulatif et le stress chronique ? Concernant la plupart des moyens, non. Mais il y a tout de même UNE énorme différence. Dans le stress cumulatif, il y a toujours un moment ou la série s’arrête. À moins, certes, de se trouver dans des situations d’exception, une situation de guerre ou de clandestinité qui dure par exemple.

Dans le stress chronique, ce n’est pas le cas. En effet, tant que vous restez dans la situation stressante, votre stress s’aggrave. Il faut donc regarder la situation en face. Le caractère stressant de la situation dépend-elle de vous ou non ? Si ça ne dépend pas de vous, est-ce un problème temporaire ou structurel ?

Cela dépend de vous

En entreprise, il est rare que le stress dépende de vous. Ou alors cela serait la conséquence d’un manque d’organisation. Alors vous perdez un temps fou pour vous y retrouver et vous risquez en permanence d’être hors délai. À moins que vous ne soyez en déficit de compétences. Et vous perdez un temps fou à chercher des stratégies de compensation qui marchent plus ou moins bien. Ou bien encore, vous êtes trop perfectionniste. Cependant, régler ce genre de difficultés n’est pas du ressort de cet article.

C’est la faute à pas de chance

Il e peut que cela ne dépende ni de vous ni de l’entreprise. La première question à se poser est : la situation est-elle temporaire ? Cela peut arriver. Imaginez un énorme surcroit d’activité complètement inattendu qui se poursuit depuis quelques mois. Imaginez que cela tombe à un mauvais moment. Vous avez un effectif réduit pour cause de congés, une pénurie de travailleurs temporaires et des délais à tenir malgré tout…

Cela met tout le monde sur les genoux. Au minimum c’est de la fatigue qui s’accumule. Mais pour des personnes prédisposées, cela peut rapidement tourner en stress. Mais s’il y a une visibilité sur le retour à la normale (le retour des congés des absents dans quelques jours, l’arrivée saisonnière d’une période de calme etc.) la situation anormale reste temporaire. Mais s’il n’y a pas de visibilité, faites comme si cela dépendait de l’entreprise.

Cela dépend de l’entreprise

Le problème le plus sérieux c’est quand la situation est chroniquement stressante. Ce peut être le cas parce que votre travail est intrinsèquement stressant. On imagine bien que les métiers de pompier, envoyé spécial dans un pays en guerre, urgentiste ou agent du GIGN sont des métiers générateurs de stress. Rien à voir avec le métier de coiffeur ou de jardinier !

Ce peut être aussi en raison d’un dysfonctionnement dans l’entreprise. Un exemple emblématique est fourni par « l’affaire des suicides » chez France-Télécom. Pour mémoire : 19 suicides réussis, 12 ratés, 8 personnes en arrêts de travail, des dizaines de dépressions… Et plusieurs dirigeants ont été condamnés pour harcèlement moral.

Mais le harcèlement moral ou les actes destinés à rendre la vie impossible aux salariés, cela existe aussi dans de petites entreprises. Et sans médiatisation. Les exemples que j’ai personnellement connus dans ma patientèle étaient tous liés à un dysfonctionnement du dirigeant. Avec parfois la complicité d’un salarié qui pense y trouver son intérêt.

Et il n’est même pas exclu d’avoir « la totale ». C’est-à-dire à la fois un métier stressant et un dysfonctionnement de l’entreprise ou du dirigeant (ce qui revient probablement au même).

Conduite à tenir

Si ça ne dépend pas de vous, votre épuisement est pour ainsi dire programmé. Parfois, comme chez France Télécom, c’est même le but recherché. Votre épuisement s’aggrave de jour en jour jusqu’à ce que vous n’en puissiez plus. C’est inévitable, inéluctable, inexorable. Si j’insiste, c’est que: :

Vous ne pourrez jamais vous débarrasser de votre stress chronique si vous ne vous extirpez pas de la situation stressante.

Le retrait de la situation n’est pas négociable. Vous DEVEZ en sortir. Évidemment, des tas de raisons peuvent s’y opposer. C’est un stress au travail et vous ne voulez pas le perdre (le travail…). Vous devez « tenir » jusqu’à la date de votre titularisation. Vous ne pouvez pas lâcher vos collègues. Etc.

Toutes ces bonnes raisons n’ont qu’un seul effet : votre état s’aggrave. Évidemment, rien ne vous empêche de pratiquer les moyens déjà indiqués contre le stress cumulatif. Mais ça ne suffira jamais. SORTEZ DE LÀ D’URGENCE !

La première mesure c’est d’aller voir votre médecin ou le médecin du travail. L’arrêt de travail s’impose. Je comprends que c’est difficile de quitter un emploi avant que ça se gâte. Mais hélas il faudrait être de première force pour résister à ça.

La seconde mesure c’est de consulter un avocat. Constituer un dossier pour que votre démission soit assimilée à un licenciement. Par ailleurs, il faudra demander aussi une indemnité. Tous les moyens de preuves sont bons. Les témoignages sont souvent difficiles à obtenir. Les preuves écrites, s’il y en a, sont les meilleures : courrier ou émails par exemple. Se rapprocher du syndicat peut vous aider.

Tout cela pour mémoire, car ça ne relève pas de ma compétence de psy.

Traitement du stress chronique

Le mot traitement fait évidemment penser aux médicaments. C’est possiblement utile mais sur le plan physique. Parfois aussi, en durée limitée, sur l’aspect dépressif ou anxieux. Mais vous ne pourrez pas en finir avec le stress avec des médicaments. À moins peut-être d’en prendre à vie ? Ce serait alors une façon de « gérer le stress » tout en le conservant.

Gérer le stress est acceptable quand il est intrinsèque au métier. À condition toutefois de pouvoir le maintenir à un niveau assez bas. Et à condition aussi que ce ne soit pas avec des médicaments à vie. Sinon, autant dire qu’on est malade à vie<.

Au-delà, il ne s’agit plus de gérer le stress mais plutôt de l’éliminer. Et là, le traitement médicamenteux montrerait vite ses limites. Il ne pourrait être qu’un adjuvant. Selon les auteurs, les traitements recommandés varient.

Les traitement plus fréquemment proposés :

  • Les médicaments en durée limitée. J’ai déjà dit ce que j’en pense ci-dessus. Mon opinion et largement partagée. Sauf par les laboratoires, évidemment.
  • La psychothérapie. J’ai expérimenté cette approche. En tant qu’ancien « psy » j’ai évidemment reçu des personnes en état de stress chronique. Le travail thérapeutique fonctionne bien sur les motifs qui vous ont fait vous enfoncer dans le stress chronique.

Ils peuvent être très divers : virilisme, réputation à préserver, déni de ses limites, incapacité à dire non, désir de plaire, ambition, crainte de perdre son revenu, avoir quelque chose à prouver ou à se prouver etc.

Ceux qui avaient les moyens de résister mais se sont laisser piéger par la « pente douce » du stress s’en sortent très bien avec ça. Ils peuvent ensuite prendre les choses en main et se réorganiser autrement.

Pour les plus « stressables », les plus prédisposés au stress, ça ne suffit pas. Pour ces personnes souvent anxieuses et peu confiantes en elles-mêmes, le passage à l’action est difficile. Elles ont besoin d’encouragements et d’un accompagnement plus directif. Ce n’est pas exactement un travail de psychothérapeute.

Si le conjoint, la famille ou les amis peuvent jouer ce rôle de soutien, c’est souvent le mieux. La participation à un groupe de parole avec d’autres personnes à la problématique analogue est parfois plus efficace. À défaut, c’est aux « psys » de se transformer en « thérapeute de soutien ». Ils ne l’acceptent pas tous.

  • La thérapie cognitivo-comportementale. Cela n’est pas de ma compétence mais il semblerait que ça fonctionne sur des symptômes précis. Car il s’agit d’un traitement symptomatique. Cela signifie qu’on s’intéresse plus au symptôme qu’à ses motifs. C’est ce que n’aiment pas les psychothérapeutes. Mai si ça marche pour vous, on n’est pas sectaire.

Les traitements moins souvent cités

  • La programmation neuro-linguistique. Le terme « programmation » donne de l’urticaire à la plupart des psys, mais elle promet un changement rapide et facile. La PNL existe depuis plus de 50 ans. Les praticiens proposent des outils spécifiques en fonction des situations. Sur le fond, la stratégie majeure est sans doute de changer son regard sur le monde, sur soi et les autres. En somme il s’agit de se déprogrammer et de se reprogrammer autrement.

Est-ce que ça peut donner des résultats sur un stress chronique ? Sur le web des praticiens l’affirment. Mais les textes qu’ils publient ne parlent que du stress tout court. Ce n’est pas la même chose. Je suis donc très sceptique quant au traitement du stress chronique par la PNL. Si je lui donne une place ici, c’est uniquement parce que l’offre existe.

  • Le mode de vie anti-stress (alimentation adaptée, activité physique, sommeil, compléments alimentaires, vitamines si besoin). A mon sens c’est insuffisamment cité et proposé. Il existe toujours une sous-estimation de ces moyens parce qu’ils paraissent trop simples. Pas assez techniques. Et pourtant, c’est probablement le meilleur « traitement de fond » pour touts les types de stress.
  • La méditation. Je ne peux qu’en dire grand bien. Ce n’est pas officiellement un traitement du stress. Mais quand on pratique régulièrement, on est peu stressable. Et si on est déjà dans le stress chronique, c’est un moyen de prendre de la distance avec les stresseurs.

La méditation vous permet alors de vous recentrer sur votre fonctionnement intérieur. Elle vous aide à ne plus vous disperser. Elle a aussi pour effet de vous détacher de vos émotions que vous pourrez observer plutôt que les éprouver. L’association avec un mode de vie anti-stress coule de source.

Les traitements encore moins souvent cités

  • La relaxation. Encore une pratique qui n’est pas estimée à la hauteur de ses effets. Je peux en témoigner personnellement en ce qui concerne le « training autogène ». Mais les autres techniques de relaxation sont également valables. Le training autogène est d’allure plus austère. Déjà parce qu’il porte un nom un peu rébarbatif.

De plus, il ne fait pas de publicité. Les praticiens se forment auprès de praticiens déjà confirmés. C’est une transmission discrète de personne à personne. Mais c’est validé et pratiqué depuis 90 ans.

Cette méthode a ceci de particulier qu’après une dizaine de séances guidées, on peut se débrouiller tout seul. De plus, elle peut se pratiquer n’importe où. Vous n’êtes pas obligé d’être allongé. Ce « training » peut également se pratiquer assis. Par exemple dans une salle d’attente, et sans que personne ne s’en doute !

La sophrologie, que j’ai pratiqué aussi, est une cousine « commerciale » du training autogène. Autre temps, autres mœurs. Comme pour l’hypnose et la PNL il y a toute une organisation commerciale de la formation des praticiens. Avec des certifications internes, des droits à payer à l’organisation mère…

La méthode n’est pas meilleure pour autant mais elle n’est pas pire non plus. Elle promet une amélioration par rapport au training autogène. Je ne l’ai pas constatée. Elle utilise juste un vocabulaire se piquant de science en mettant du « sophro » partout. Il me semble qu’elle fait jeu égal avec le training autogène.

  • L’hypnose. Très peu citée pour le stress chronique. Mais beaucoup pour le stress tout court.

Mon avis personnel

Ce n’est pas parce qu’un moyen est plus souvent cité qu’il est meilleur. Les praticiens eux-mêmes parlent de ce qu’ils connaissent. Et l y a beaucoup de choses qu’ils ne connaissent pas. Par exemple, les effets de l’alimentation. Pour traiter le stress chronique, je privilégierais donc les moyens suivants : mode de vie anti-stress, méditation (à défaut de trouver un maître en méditation, une méthode de relaxation) et entretiens avec un psy.

Ce dernier vous aidera à surmonter vos tendances à vous maintenir ou à replonger dans le stress. Ce pourra être une psychothérapie ou simplement une maïeutique d’aide. Voire un accompagnement « de soutien ». Cela dépend de votre cas.

Et je n’exclue pas un traitement médical temporaire si votre organisme en a vraiment besoin.

Se débarrasser du stress post-traumatique

S’il y a un stress dont ceux qui en sont victimes veulent se débarrasser, c’est bien celui-là. Parce que c’est le pire, tout simplement. Imaginez, par exemple, que vous ayez été victime d’une catastrophe ferroviaire.

Comme beaucoup d’autres, votre wagon a déraillé. Il a glissé sur 200 mètres, d’abord sur les traverses. Puis il s’est couché sur le côté et a encore parcouru 100 mètres avant de s’arrêter brusquement contre un bâtiment le long de la voie.

Plusieurs fois par jour vous « revoyez » subitement la scène : le premier choc, les secousses infernales, l’impossibilité de s’accrocher à quoi que ce soit, les heurts avec les autres passagers. Vous vous revoyez, projeté brusquement sur la paroi au moment de l’arrêt brutal. Vous avez perdu conscience.

Vous revivez le chaos quand vous revenez à vous, les bruits, les odeurs, les cris de gens. Vous revoyez le visage en sang de cet enfant mort très proche de vous. Etc. Vous avez la reviviscence de la douleur, de l’emballement cardiaque, de l’angoisse de mort qui vous a étreint. Vous aviez une jambe cassée, vous étiez coincé sous d’autres personnes avec un monceau de bagages par-dessus. Vous étiez paralysé par l’angoisse, vous étiez en panique. Etc.

Et ça vous revient plusieurs fois par jour, ou la nuit. Vous faites des cauchemars, vous vous réveillez en sursaut. Vous revoyez le visage de l’enfant. Ça vous obsède. Vous êtes aussi devenu irritable, colérique. Vous en voulez à votre famille de ne pas vous comprendre.

Vous avez maintenant des troubles gastriques, vous ne mangez presque plus. Vous sursautez au moindre bruit. Vous avez des crises d’angoisse violentes à suffoquer. Petit à petit vous sombrez dans une dépression sans nom. Vous vous abrutissez de médicaments.

Vous croyez que j’exagère ?

Je n’ai pas forcé le trait. Je connais bien la question.

Je ne suis pas que spécialisé dans la mémoire, j’ai aussi suivi une formation en victimologie. Et devinez quoi ? En victimologie, c’est syndrome de stress post-traumatique à tous les étages… Ce que j’ai décrit ci-dessus, non seulement ça existe mais ne n’est même pas rare.

On rencontre ce phénomène dans des quantités de situations. Il n’y a pas, en effet, que les prises d’otages, les tueries ou les catastrophes aériennes qui peuvent faire craindre pour votre vie. Il y a bien d’autres exemples : accident de la route, agression, harcèlement menaçant, violences conjugales… Ou encore accident de sport, naufrage, accident industriel, (rappelez-vous AZF à Toulouse), incendie etc.

De plus, cela ne touche pas que les victimes à proprement parler. Les témoins aussi. En effet, être témoin d’un accident peut tout à fait générer un état de stress post-traumatique. Surtout si vous êtes en lien émotionnel avec la ou les victimes.

On rencontre des quasis invariants : une peur intense, un stress aigu, un sentiment d’effroi… Face auxquels surtout on se sent impuissant. Ce sentiment d’impuissance est très souvent présent.

À des degrés divers on rencontre aussi toujours à peu près les mêmes symptômes. Je vais vous donner quelques exemples anonymisés.

Trois exemples réels

Anna

Son véhicule a été percuté et poussée sur une centaine de mètre par un camion. Étonnamment, elle s’en est sortie indemne. Du moins physiquement.

Mais elle s’est épuisée en réminiscences continuelle de l’accident. Celui-ci revenait en cauchemar toutes les nuits. Elle sursautait au moindre bruit inhabituel. Elle est devenue anxieuse, ne pouvait plus manger. Une grosse dépression s’en est suivie, elle est devenue quasiment anorexique.

Elle n’a jamais pu remonter dans une voiture. Des années plus tard, elle cauchemarde toujours. Les craignant, elle recule continument le moment d’aller se coucher. Elle sombre dans une dépression d’épuisement alors même qu’elle n’exerce plus aucune activité.

Sylviane

Sa maison a brûlé nuitamment ainsi que les maisons accolées de ses voisins. Toute sa maisonnée a été évacuée à temps mais un des voisins est mort dans l’incendie. Ses symptômes sont moindres que ceux d’Anna mais handicapants. Au début, elle a aussi des réminiscences intempestives, des emballements cardiaques et des cauchemars. Sans parler des angoisses en allumant sa gazinière…

Mais elle décide de quitter le quartier. Après deux années passées en location dans un immeuble, elle décide avec son conjoint d’utiliser leur indemnité d’assurance pour faire construire une maison dans un lotissement. Elle ne veut plus de maison mitoyenne… Repartie de zéro dans un nouvel environnement, ses symptômes ont diminué. Les cauchemars sont devenus rarissimes.

En revanche elle est d’une prudence maladive vis-à-vis du feu. Elle a remplacé la gazinière par une cuisinière électrique. Elle a banni les allumettes. Son mari est interdit de cigarettes. Il y a plusieurs extincteurs dans la maison. Elle stocke des bidons d’eau dans le garage, où il y a un tuyau connecté en permanence à un robinet. Les feux d’artifice l’angoissent. Et en balade elle ne mettrait jamais les pieds dans une forêt de résineux…

Gilbert

Il était routier. Il avait dû procéder, avec deux collègues au changement d’une roue. Le pneu avait éclaté en tuant ses collègues. Lui, derrière eux, avait « seulement » été victime de contusions et d’un blast tympanique moyen dont il conservait des acouphènes.

Quand je le reçois, il est au plus bas. Non seulement il revit / revoit la scène parfois plusieurs fois par jour mais il a des crises d’angoisse violentes. Il croit alors devenir fou, donne alors des coups de poing sur la table ou se cogne la tête sur les murs. Il a été hospitalisé plusieurs fois en urgence.

Bourré d’anxiolytiques, il se sent responsable de la mort de ses collègues parce qu’il s’agissait d’une roue de « son » camion. L’enquête n’a cependant montré aucune faute de sa part. L’explosion, sans motif défini, était absolument imprévisible.

Il dort très mal et devient dépressif, puis carrément mélancolique, ce qui désigne en termes de métier une dépression grave avec forts risques de suicide. Il est hospitalisé en psychiatrie.

On se demande comment se débarrasser de tout ça…

Ce ne sont que trois exemples, mais à travers eux, vous avez déjà une idée de ce que peut donner un état de stress post-traumatique. Bien entendu, tout dépend de la situation et la résilience ou de la prédisposition au stress des personnes. C’est impossible à prévoir. Mais cela peut aller de l’apparente rémission spontanée (Sylviane) jusqu’à l’hospitalisation de longue durée (Gilbert) en passant par une vie gâchée par des symptômes oppressants (Anna).

Bref, la situation peut vous apparaitre assez vite désespérée, comme un calvaire sans fin. Qui ne voudrait pas en sortir au plus vite ? Mais compte tenu de l’état psychologique des personnes en état de stress post traumatique, elles désespèrent d’apercevoir le bout du tunnel.

Cependant, la question du traitement de cet état fait l’objet de recherches depuis plus d’un siècle. Comme on l’a vu plus haut, d’abord chez les médecins militaires. Mais aujourd’hui, cela concerne les civils aussi. Surtout depuis que les victimes civiles d’attentats ont été plus ou moins assimilées aux victimes militaires de PTSD, en France du moins.

C’était une revendication de ces victimes. Il a fallu du temps pour qu’elles soient entendues mais cela s’est fait. Cela leur a ouvert l’accès aux services médicaux militaires. Il faut dire qu’à l’époque les médecins, psychiatre et chirurgiens civils étaient subitement confrontés à une traumatologie physique et psychique qu’ils n’avaient jamais eu à traiter. Cela a évolué depuis.

Traitement ou traitements du stress post-traumatique ?

A priori, le PTSD semble du ressort du psychiatre ou du psychologue, voire les deux. Il n’est donc pas rare que « le traitement » soit une combinaison de plusieurs traitements.

D’ailleurs le Vidal, qui est la bible des traitements à destination des médecins, fait état en premier lieu des thérapies comportementales ou de l’hypnose. Ce faisant, il reprend les conclusions de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Ce dernier avance en effet en premier lieu les psychothérapies et l’EDMR (voir plus bas).

Les médecins ne considèrent donc pas les médicaments comme efficaces en première intention. Ils ont raison. Dans l’état de stress post-traumatique, c’est surtout le psychisme qui trinque. Mais il n’y aurait pas de psychisme sans substrat organique. Ce dernier aura donc peut-être besoin d’un traitement médicamenteux. C’est intriqué.

Par ailleurs, il faut distinguer espace public espace privé. Et de même entre atteintes collectives et atteintes individuelles. La Une des journaux se fait uniquem0ent sur les atteintes collectives dans l’espace public…

On parle donc ici essentiellement d’accidents collectifs (écroulement d’immeuble, déraillement, naufrage, crash aérien etc.), d’attentats ou de catastrophes naturelles soudaines (tremblements de terre, inondations, incendies etc.). Dans ces cas-là la préfecture déclenche un plan de secours et dépêche des cellules d’intervention d’urgence médico-psychologique via le SAMU.

Ces dernières pratiquent généralement le débriefing psychologique. Dans la version française, il s’agit d’une technique « post-immédiate » destinée à évacuer les émotions et à remettre du sens dans ce que la personne vient de vivre. Une procédure inexistante pour les cas individuels.

Ci-dessous, je vais tenter une revue de détail des traitements. En commençant par le débriefing psychologique, même si ce dernier ressemble plutôt à une action préventive.

Le débriefing psychologique

Historiquement, c’est un certain Mitchell qui, aux Etats-Unis, a codifié la procédure. On demande aux rescapés, entre 24 et 72 heures après l’événement de participer à une réunion. Expérimenté chez les pompiers, la méthode a été parée de beaucoup de vertus. Les enquêtes scientifiques sur les résultats ne sont pas vraiment d’accord.

Le principe

Au cours de la réunion, on cherche à faire verbaliser les personnes au sujet de ce qu’ils ont vécu. Mais sur le plan rationnel des perceptions : que s’est-il passé, qu’avez-vous vu ou entendu, à quel moment, qu’y a-t-il eu avant et après etc… C’est ainsi que je l’ai appris moi-même mais sûrement pas ainsi que je l’ai pratiqué…

En effet, cette méthode excluait d’emblée les expressions émotionnelles ! Heureusement, dans les pays latins, on a « adapté » la méthode. Au point même, assez souvent, de commencer par les émotions ressenties… Ensuite, il était plus facile de passer à la reconstitution de l’événement.

Cette phase lui donne du sens. La personne peut alors se situer dans l’événement. Elle peut comprendre l’enchaînement des faits et situer sa présence dans le temps et l’espace de l’événement. Sans cela, les émotions, les pensées, les ressentis tournent en rond dans l’esprit des victimes.

Ainsi s’expliqueraient les irruptions intempestives et sans fin des reviviscences. On considère que, faute d’être recyclées dans le cours normal de la compréhension, de la rationalité, ces émotions, ces peurs restent complètement séparées du reste de la psyché. Elles forment une sorte de bulle orpheline de tout lien avec les autres composants de la mémoire autobiographique.

Ce sont des émotions « errantes », dont le souvenir ne peut se raccorder à aucune autre. Mais elles existent néanmoins. Leur irruption intempestive dans la conscience sous forme de reviviscences sonne comme une tentative désespérée de recyclage.

Le débriefing psychologique à l’européenne a donc pour ambition d’aider à les recycler dans le psychisme. Le plus tôt possible. Quoique mon expérience et celles des collègues montrent qu’on peut encore agir bien après les 72 heures de Mitchell. Mais aussi, que plus le temps passe, plus c’est difficile.

Les résultats.

Pratiquée à l’américaine, la méthode a clairement fait faillite. Au mieux, les résultats sont décevants. On s’en doutait depuis longtemps. Mais l’inertie des praticiens est grande, il faut bien le reconnaitre. Au pire, elle a pu faire des dégâts. Pour une raison simple : il a été enseigné qu’elle pouvait être pratiquée par n’importe qui, pourvu qu’on suive la procédure.

Il faut toujours se méfier de la rigidité des procédures… Les humains ne sont pas des êtres standards. Une procédure standard pourra convenir à certain et pas à d’autres. Ou même, parfois à personne. C’est comme si on donnait la même pointure de chaussure à tout le monde, pourvu que ça soit une pointure moyenne normalisée.

Pratiquée à l’européenne, la méthode est actuellement en cours d’évaluation. Certes, il y a déjà eu des évaluations. Mais il était impossible de les agréger. Chacune avait ses propres critères d’évaluation. Cela allait de l’auto-évaluation par le patient à l’évaluation lors d’un entretien en passant par des questionnaires d’évaluation.

Je suis assez confiant quant aux résultats de l’étude en cours. La raison est qu’en France, pas mal des praticiens du débriefing sont des psychologues. D’autres sont médecins ou psychiatres. On rencontre parfois des infirmiers. Malgré des différences d’expérience, ils sont tous à l’écoute des personnes. Ils ne sont pas que dans la procédure.

Pratiqué de cette manière le débriefing psychologique est sans danger. C’est déjà ça. Il est considéré comme une aide par la majorité des personnes qui l’ont vécu. Ce qui reste à mesurer, c’est s’il permet bien une réduction des cas dans lesquels se produit après-coup un état de stress post-traumatique. Ah, à ce propose on peut dire maintenant en français ESPT (état de stress post-traumatique) au lieu de PTSD…

L’EDMR

Pour cette technique je dois faire amende honorable parce que, pendant longtemps, je ne l’ai pas prise au sérieux. Imaginez un peu : vous demandez au patient de se concentrer sur ce qu’il a éprouvé lors de l’événement. Régulièrement vous lui demandez de faire des mouvements des yeux. Ensuite les émotions négatives du patient se dissolvent… Avouez qu’il y a de quoi être sceptique !

A tort. Les évaluations sont formelles : ça marche !

Avant d’aller plus loin rappelons que ce ne sont pas tant les souvenirs intrusifs qui posent problème. Non, c’est surtout la charge émotionnelle qui les accompagne : panique, désespoir, anxiété, peur de mourir etc.

Qu’est-ce que l’EDMR? Si j’en crois le terme in extenso c’est l’Eye Movement Desentitization and Reprocessing… Bon, en français disons la désensibilisation et le retraitement par des mouvements oculaires. Retenons surtout « désensibilisation et retraitement ».

Ce que l’EDMR parvient à faire, c’est une diminution de la charge émotionnelle liée aux souvenirs intrusifs.

Si la charge émotionnelle diminue, techniquement cela signifie qu’elle a pu sortir de sa bulle. Qu’elle a pu être acheminée et se lier ailleurs. Alors que le souvenir traumatique était orphelin de tout lien. Certains praticiens pensent que ces mouvements oculaires établissent en effet un lien avec le cortex.

Comment ? On n’en sait rien encore. On ne sait pas du tout sur quel principe ça fonctionne mais le résultat est observable. Cerise sur le gâteau, on note aussi un effet favorable sur l’anxiété ou la dépression…

La psychothérapie cognitivo-comportementale centrée sur le traumatisme.

Voilà une appellation à rallonge… mais cela désigne une méthode de travail. Il s’agit d’analyser les situations ou les problèmes en les décomposant. On recense les émotions, les pensées et les comportements.

A partir de ces données, les thérapeutes comportementalistes se font fort d’aider la personne à modifier son comportement ou ses pensées « erronées ». On entend par là des interprétations erronées de la situation vécue.

Cependant, j’ai plutôt remarqué chez ce type de patients une absence de pensée. Faute, sans doute, de trouver du sens ou une explication aux symptômes qui les agitent. Comme un sentiment d’impuissance qui vient redoubler celui ressenti lors de l’événement.

En revanche, si vous êtes le siège d’un ESPT vous êtes surtout traversé par des émotions violentes, négatives et souvent de haute intensité. Quant aux comportements, c’est limité, le seul comportement spécifique que j’ai pu noter c’est l’évitement. J’avoue donc être circonspect face à ces affirmations visant à modifier pensées et comportements.

Sur leurs sites, pourtant, certains comportementalistes n’hésitent pas à écrire : « ce sont vos idées négatives qui sont la source du problème ». Allez expliquer ça à une personne en état de stress post traumatique !

Toutefois, la participation active du patient dans le travail thérapeutique est une nécessité quelque soit le type de thérapie. Quand on est accablé, on ne s’en sort pas par la passivité. Mais bien en étant partie prenante du processus thérapeutique.

Alors, en fin de compte qu’est-ce que ça donne ?

Le résultat des études

Des organismes sérieux (OMS, INSERM par exemple) considèrent que c’est une bonne méthode. Sur quoi se fondent-elles ? En cherchant un peu, on trouve bien des méta-études (c’est-à-dire des études agrégeant les résultats de multiples études) sur la question. Mais le moins qu’on puisse dire est qu’elles sont… circonspectes.

D’un côté elles concluent que l’efficacité des thérapies centrées sur le trauma continuent d’être « soutenues ». Après quoi, comme l’étude dont voici le lien, par exemple, elles évaluent les preuves constatées. « Nous avons estimé la qualité globale des études comme très faibles. Les conclusions de cette revue doivent donc être interprétées avec prudence. Il n’y a pas suffisamment de données probantes pour montrer si la psychothérapie est nocive ou non. ».

C’est peu de dire que les auteurs sont en pleine contradiction ! La plupart des méta-études également. Leurs auteurs semblent avoir une certaine bienveillance a priori pour les thérapeutes qui participent à des petites études locales. Mais quand il s’agit d’engager leur crédibilité, ils font machine arrière toute !  Il n’y a que les études princeps pour affirmer que leurs résultats sont excellents… Même si elles sont mal conçues et scientifiquement non probantes. On n’est jamais si bien servi que par soi-même !

Tout cela n’est pas très encourageant. Et pourtant… Nombre de thérapeutes dont moi-même, peuvent témoigner avoir tiré d’affaire des personnes en état de stress post-traumatique. Pourquoi ce grand écart ? En fait, quelle que soit l’obédience théorique du thérapeute, ce dernier va toujours se trouve « court » face à un état de stress post-traumatique.

Il ne pourra jamais pratiquer sa méthode de façon orthodoxe. Or les études ont été faites sur des pratiques orthodoxes. Et leurs résultats ne sont clairement pas bons. Ma conclusion, c’est qu’il faut pratiquer autrement.

Alors qu’en est-il réellement ?

Imaginez-vous un psychanalyste vous dire alors que vous souffrez le martyre jusqu’à vous taper la tête contre les murs : « Allongez-vous, dites-moi tout ce qui vous passe par la tête. Dans 5 ou 6 ans ça ira mieux, vous verrez … » ?

Imaginez-vous un thérapeute cognitivo-comportemental vous proposer une remise en question dans l’état où vous êtes : « C’est juste que vos pensées ne sont pas correctes et vos comportements pas adéquats. Je vais vous aider à penser objectivement et à réagir adéquatement … » ?

On ne peut pas accepter ce type de patient et camper sur sa pratique orthodoxe. Il va falloir plus d’écoute que d’habitude et surtout être créatif pour l’accompagner. Accompagner est certainement le maître mot. D’autant que les personnes « traumatisées » sont souvent devenues méfiantes ou incrédules. Voire persuadées qu’on ne peut rien pour elles. Mais aussi parfois quérulentes et exigeant des résultats !

Alors il faut bien d’abord les suivre dans leurs plaintes et accepter leurs « pensées erronées ». Puis, avant que ça ne tourne en rond dans la répétition du même, imaginer une sorte de mélange entre entretiens et suivi de projets à mettre en œuvre.

Les entretiens pour prendre un peu de distance par rapport aux « pensées erronées ; les choses à faire pour se reconnecter à la vie en action. Ce dernier point est crucial. On peut même dire que dans un cas de PTSD, l’action peut avoir en soi un rôle thérapeutique. Tout cela c’est du cas par cas, il faut inventer avec le patient.

En conclusion, il est inutile de rechercher un « psy » d’une obédience particulière. La seule chose importante, c’est qu’il soit ouvert et que vous soyez prêt à prendre en charge votre part du traitement.

L’activité physique

Une citation sans nom d’auteur figure dans quasiment tout texte concernant le traitement du syndrome de stress post-traumatique : « La pratique régulière d’une activité physique contribue à une amélioration de l’humeur et de l’estime de soi, une réduction du stress et favorise la reconstruction de l’image de soi ».

Je prends ! Par d’exemple, l’apprentissage de la natation a été aidant pour mon patient routier. Plus salvateur encore a été le fait d’aider son fils à faire des travaux dans sa maison. Alors qu’il avait perdu tout ressort et ne se sentait plus capable de faire quoi que ce soit.

C’est dans cet état qu’il m’est venu en consultation après son séjour en hôpital psychiatrique. Se rendre compte qu’il était capable de « faire » a été un accélérateur dans son évolution. Sans compter le relationnel que cela a occasionné : avec sa famille, les marchands de matériaux et même les voisins ou amis venus prêter main forte.

Tout cela s’est fait à quart temps au début, ensuite quasiment à mi-temps. Selon moi, il importe peu qu’il s’agisse d’une activité sportive, de loisir ou de travail. L’important est de faire quelque chose dont les résultats sont observables. Par exemple :

  • « C’était brut de décoffrage, j’en ai fait une salle de bain ».
  • « Il y a 3 mois je ne savais pas nager, aujourd’hui je sais ».
  • « Il y a un mois, je faisais moins de 1000 pas par jour, aujourd’hui 6000 ».

A priori ce type de choses peut être conseillé par n’importe quel praticien ayant à connaître le patient. Pour ma part, je trouve qu’il est particulièrement adéquat que cela soit instigué par le thérapeute. C’est une partie du traitement. D’ailleurs un médecin peut le prescrive sur ordonnance.

La fixation d’objectifs

Il s’agira alors souvent d’activités dans des centres de réadaptation, aux côtés d’handicapés moteurs. Pas très rassurant pour des personnes fragiles. Ou bien d’activités sportives sous réserve de supervision par, je cite :

  • un professionnels de santé : kinésithérapeute, ergothérapeute ou psychomotricien
  • un professionnel titulaire d’un diplôme dans le domaine de l’activité physique adaptée,
  • un professionnel qualifié « disposant des prérogatives pour dispenser une activité physique aux patients atteints d’une affection de longue durée ».

Pas évident car les associations sportives ont rarement dans leurs rangs un tel professionnel… Et quand il s’agit de faire du carrelage chez son fils, n’en parlons même pas.

Néanmoins ce dispositif existe et exige du médecin qu’il fixe un objectif. Ce sera souvent la diminution du stress ou la restauration de la confiance en soi. En pratique, la restauration des liens familiaux ou la resocialisation, par exemple, restera à l’instigation du psychothérapeute. Même si, ordinairement, ça ne fait pas partie de sa feuille de route !

Dans ce cadre, un état des lieux de départ est indispensable. C’est un repère objectif. Un patient peut très bien penser qu’il ne marche pas plus qu’avant, par exemple. Mais si son podomètre lui démontre l’inverse, sa « pensée incorrecte » va s’évanouir. Et surtout ce sera l’occasion, en thérapie, d’évoquer la fiabilité de ses impressions sans rien brusquer.

Pour autant, il ne s’agit pas d’objectifs comme pour des sportifs. « Faire mieux cette semaine que la semaine dernière » et ainsi de suite, est bien mieux adapté. En effet il s’agit surtout de se comparer à soi-même en regardant en arrière. On évite ainsi la réaction-type : « je n’y arriverai jamais ! » face à un objectif futur.

L’hypnose

L’hypnose fait partie, selon l’INSERM, de la panoplie des traitements efficace contre le stress post-traumatique. De plus, connaissant un peu la question je tiens l’hypnose pour une pratique sérieuse. C’est donc en confiance que je recherche sur la Toile des études sur les résultats de l’hypnose sur le syndrome de stress post-traumatique. Et là, stupeur : rien. Des études sur son efficacité « en général » oui. Concernant la douleur, oui. Concernant l’anxiété, oui. Pour le sommeil, oui. Mais concernant le PTSD, aucune…  J’ai écumé les 10 premières pages de recherche sans résultat aucun.

Évidement je pourrais me contenter de répéter ce que dit l’INSERM… Mais cet Institut est parfois curieusement positif sans donner de résultats probants ou en en donnant par ailleurs qui ne le sont pas.

J’ai quand même regardé les 100 premiers résultats de ma recherche sur le web. Ils mènent pour la grande majorité sur des sites de cabinets d’hypnose. Il y en a pour tous les goûts. Vous pouvez avoir de l’hypnose douce, de l’hypnose conversationnelle, de l’hypnose régressive, de l’hypnose dissociative… Nature ou aromatisée d’EMDR ou de psychothérapie cognitive ou comportementale, à vous de voir..

Les promesses des praticiens.

Selon la première page de ces sites, l’hypnose guérit tout. Et spécifiquement pour le stress post-traumatique on vous propose de :

  • « rechercher en profondeur les émotions qui se présentent ». Bigre ! Comme si elles ne se présentaient pas d’elles-mêmes…
  • « libérer des affects bloqués ». Il me semblait qu’ils ne se libéraient que trop bien et intempestivement…
  • « reconfigurer le vécu traumatique », là, ça se défend.
  • « s’attaquer à la cause du stress ». Baste ! Ils vont rechercher le chauffard, le terroriste ou l’incendiaire ?
  • « permettre de se relaxer lorsque la « situation stressante est sur le point de se présenter ». Juste avant que le tremblement de terre ou l’accident ne se produise? Relax Max, ça va bien se passer !
  • « mettre fin à l’expérience traumatisante » Je vous jure que c’est écrit comme ça ! Au fait, quand le syndrome se déclenche l’expérience est déjà finie, non ?

Incroyable mais vrai. Et je pourrais continuer longtemps. L’un précise que « « lors d’une séance d’hypnose, le thérapeute entre en fusion avec le patient ». Fichtre ! Un autre qu’il a « accès à votre inconscient ». Il a un passe-partout ?

On propose aussi « d’enrichir le patient d’une expérience nouvelle en permettant au sujet de réorganiser l’événement traumatique, (il va falloir voyager dans le temps !) en intégrant de nouvelles émotions ». Le praticien précise que c’est « une des meilleures façons de traiter le syndrome de stress post-traumatique ».

Enfin une conclusion qui ira droit au cœur : « En somme, l’hypnose va, en quelques instants seulement, désensibiliser le trauma unique de la catastrophe endurée ». Tudieu ! J’y cours…

Ce que j’en pense

P0our moi qui ai connu l’hypnose « sérieuse » avec Léon Chertok, je suis tombé de haut. Où sont les praticiens sérieux ? Sur la centaine de site que j’ai parcourue (eh oui, 100…) seuls 7 n’étaient ni dithyrambiques ni attrape-tout. Parmi eux, seuls 4 mettaient le PTSD à l’affiche mais sans autre précision. Espérons qu’il y en aura au moins un de sérieux.

Je précise que je ne m’attendais pas à ce capharnaüm commercial. L’hypnose rend de TRES grands services. Pour vous donner une idée on l’utilise pour les opérations délicates sur le cerveau, sans anesthésie. Mais juste un état de conscience modifié.

Cela permet de tester le patient permanence en lui demandant de faire des raisonnements ou des opérations mentales par exemple. Si sa performance devient moins bonne on sait qu’on touche un endroit crucial et qu’il ne faut pas aller plus loin. Pareil protocole est absolument inimaginable sans l’hypnose.

Les résultats positifs de l’hypnose sur la douleur ou l’anxiété sont très documentés. On a aussi des résultats favorables sur le stress cumulatif ou sur le stress chronique.

Pour autant, il me parait impossible de confirmer l’efficacité de l’hypnose sur le syndrome de stress post traumatique. Pour l’instant il semble que ce soit de l’ordre de l’affirmation commerciale. Si vous connaissez une étude sur ce point je suis preneur. Comme je suis perfectionniste je vais aller fouiller sur le web en anglais et dans le corpus des revues scientifiques auxquelles j’ai accès.

Ça risque d’être long mais si vous êtes inscrit sur la liste de diffusion (c’est gratuit et il n’y a aucune arrière-pensée commerciale…) vous serez averti quand je complèterai le présent article.

Les médicaments.

Il existe deux antidépresseurs à action modérée mais observable sur le stress post-traumatique. Même si vous n’êtes pas déprimé! Ce sont des « inhibiteurs de la recapture de la sérotonine » … Ils sont validés dans la plupart des pays. Leurs noms : paroxétine et sertraline. D’après le Vidal, leur effet est observable au bout de 3 ou 4 mois.

Une étude prometteuse est faite en France sur l’effet du Propranolol associé à un protocole de récit de l’événement traumatique. Si l’étude devait valider le bien-fondé du protocole, ce serait une révolution.

Pensez-donc : on vous injecte une dose et vous racontez votre histoire traumatique qui est consignées par écrit. Une semaine plus tard, encore une injection et vous lisez à haute voix votre récit de la semaine précédente. Rebelote les 5 semaines suivantes.

Dès la cinquième semaine, les patients se disent en décalage par rapport à leur texte initial. Leur souvenir est intact mais la charge émotionnelle a baissé considérablement. La souffrance a quasiment disparu. C’est du moins ce qui a été constaté dans une étude canadienne.

Le professeur Millet, responsable de l’étude, m’avait indiqué l’an dernier que les résultats seraient disponibles fin 2021. Je ne les ai pas encore. Lorsque ce sera fait je publierai les résultats au sein de cet article.

Si les résultats canadiens sont confirmés, ce serait une nouvelle ère dans le traitement de l’état de stress post-traumatique. Rendez-vous compte, on s’en débarrasserait en un mois et demi ! Cela parait trop beau pour être vrai. La promesse serait encore plus folle que celle des hypnotistes les plus déjantés… Mais l’étude canadienne a été sérieusement contrôlée. C’est d’ailleurs pourquoi l’étude française a été autorisée avec des volontaires rescapés de attentats du 13 novembre 2015. On attend les résultats avec impatience.

Conclusion pour le traitement du stress post-traumatique

Résumé de situation

Toutes les études placent les psychothérapies en tête pour l’efficacité, devant les médicaments. Néanmoins, vous vous rappelez mon gros bémol au vu des 2 grosses méta-études qui les jugent peu probantes.

Quelques études américaines font état de bons résultats de l’hypnose sur des militaires ou des victimes d’attentats. Je m’en méfie beaucoup car elles sont déjà anciennes (la guerre du Vietnam…). De plus, ni la pratique ni la méthodologie ne sont constantes. Il y a souvent eu d’autres traitements en parallèle. On ne peut pas les agréger.

Pourtant c’est intéressant. Quand on est praticien, on sait bien qu’on a des réussites dès lors qu’on accompagne le patient sans a priori et avec une combinaison de moyens. Or ces combinaisons n’ont quasiment jamais fait l’objet d’une étude spécifique. Cela reste à faire.

Dans les méta-études, l’EDMR est considéré comme une psychothérapie. C’est probablement la pratique qui est la plus documentée. Même si j’ai dû mettre un gros bémol aux résultats des psychothérapies, il reste que l’EDMR est classée quasiment toujours devant les autres formes de thérapie.

Quel traitement adopter ?

Si j’étais encore en fonction j’accepterais toujours les patients en état de stress post-traumatique en psychothérapie. Je n’hésiterais pas à leur suggérer de tenter l’EDMR en parallèle. Je chercherais à leur faire faire des choses nouvelles, pas forcément des activités qu’ils pratiquaient avant. Apprendre sans références à un savoir-faire d’avant réduit les « défenses » du genre « avant je pouvais, maintenant je ne peux plus… ».

J’instiguerais à restaurer les liens psycho-sociaux : avec la famille, avec les amis, avec les collègues, avec de nouvelles personnes. C’est du domaine du sur-mesure, à utiliser avec prudence. Mais c’est très aidant pour les patients.

L’activité physique, qui peut rester modérée (par exemple marcher ou jardiner), rencontre rarement des contre-indications. C’est une activité anti-stress. Au fait, savez-vous que, malgré les aléas climatiques, jardinier est considéré comme un des métiers les moins stressants ?

Digression à part, nous avons là des possibilités réelles de traiter le PTSD. Sans oublier les médicaments, qui ne sont pas bannis… Donc, si vous êtes en état de stress post-traumatique, une bonne solution pourrait être de chercher un psy sans a priori.

Un psy qui accepte de personnaliser sa pratique en dehors des routines de sa spécialité ; qui accepte aussi de susciter des changements dans votre vie réelle sans être dogmatique pour autant. Bref, quelqu’un avec qui vous pourrez faire équipe. Cela suppose de votre part d’accepter votre part du boulot. Celui du psy, c’est de vous épauler dans votre reconstruction. Le vôtre c’est de faire des choses activement.

Comment ? Vous dites ? Ah non, désolé, moi je n’accepte plus personne, je suis à la retraite maintenant… Il va falloir trouver un autre praticien. Et puis, sait-on jamais, le protocole « propranolol + récit » rendra peut-être inutile toute psychothérapie…