Le Club Memori
Pour ceux qui veulent comprendre, maintenir et améliorer leur mémoire.
Vulgarisation scientifique, méthodes, trucs et astuces pour bien mémoriser.

Voici quelques trivialités que j’ai entendues ces derniers temps.

  • La mémoire fout le camp, ma bonne dame
  • On ne sait même plus son propre numéro de téléphone…
  • À quoi ça servirait d’apprendre ? Il n’y a qu’à demander à Chatte Gépété.
  • Ah ben moi, j’fais plutôt d’la méditation d’pleine conscience, ça me la booste, ma mémoire !

Tiens ? Intéressante, cette dernière.

Mais, humm… sachant que moins on utilise ses neurones et plus vite ils prennent leur retraite, est-ce que la méditation les remettrait en selle ? C’est ce qu’il se dit. Voyons voir… Eh bien, la consultation en ligne des revues scientifiques de référence me le confirme. Oui, c’est vrai, la méditation fait du bien à votre mémoire (mais pas que). Ce sera le sujet du jour.

Le présent article inaugure un format plus court. Figurez-vous qu’on me dit parfois que mes articles sont trop longs, que beaucoup demandent plus 20 minutes de lecture… Je ne pensais pas que ça pouvait être un problème. Mais bon, je ferai de temps en temps des articles plus courts, il en faut pour tout le monde.

La méditation, pratique millénaire issue de diverses traditions spirituelles, a longtemps été ignorée par la Science. Ce n’est plus le cas. Elle fait même l’objet d’un intérêt scientifique croissant ces dernières décennies. Et les neurosciences modernes ont permis de constater que cette pratique influence notre cerveau et notre comportement.

Image représentant un cerveau humain futuriste composé de circuits imprimés
Image par Felix Martinez de Pixabay

De nombreuses études utilisant l’imagerie cérébrale ont été faites. Elles démontrent que la méditation régulière entraîne des changements structurels et fonctionnels dans le cerveau :

  • Épaississement cortical : L’équipe de Sara Lazar (Harvard Medical School) a découvert que les méditants expérimentés présentent un épaississement cortical. Pas n’importe où… Mais dans des régions associées à l’attention et au traitement sensoriel, notamment le cortex préfrontal et l’insula droite.
  • Augmentation rapide de la matière grise : Une étude d’Hölzel (souvent présentée aujourd’hui comme une étude de référence) a démontré qu’après seulement 8 semaines de pratique méditative, les participants présentaient une augmentation de la densité de matière grise dans l’hippocampe (très impliqué dans la mémoire), et d’autres zones cérébrales.
  • Réduction de la taille de l’amygdale : Des études, notamment de Taren et de Desbordes, ont montré une diminution du volume de l’amygdale (centre de la peur et de la réponse au stress) chez les méditants réguliers.
  • Activité des ondes cérébrales : Les méditants expérimentés montrent une augmentation des ondes alpha et thêta, associées normalement à la relaxation et à l’attention soutenue (Cahn & Polich,. Les méditants actionnent les deux en même temps !
  • Connectivité neuronale : L’étude de Fox a démontré une meilleure connectivité entre les réseaux cérébraux, spécifiquement entre le réseau du mode par défaut et le réseau de contrôle exécutif.
  • Modification du réseau du mode par défaut : La méditation modifie l’activité du réseau du mode par défaut (Brewer).

Note : le mode par défaut est le mode de fonctionnement naturel du cerveau lorsqu’il n’a aucune tâche spécifique à accomplir. Une sorte de vagabondage mental, quoi…

Celles-ci sont très nombreuses. Elles concernent aussi bien la gestion du stress, les fonctions cognitives ou les relations interpersonnelles.

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  • Réduction du stress : La méta-analyse de Goyal publiée dans JAMA Internal Medicine a confirmé l’efficacité de la méditation de pleine conscience pour réduire l’anxiété, la dépression et la douleur.
  • Diminution des biomarqueurs du stress : Des études ont démontré une réduction des niveaux de cortisol (l’hormone du stress) et une amélioration des marqueurs inflammatoires chez les méditants (Rosenkranz).
  • Meilleure régulation émotionnelle : Une étude de Tang montre, après seulement 5 jour de pratique de la méditation, une meilleure conscience de ses émotions et une diminution des réponses impulsives.
  • Amélioration parallèle de la santé cardiovasculaire : Une étude longitudinale de 5 ans par Schneider a montré une réduction de 48% du risque d’événements cardiovasculaires chez les personnes pratiquant la méditation transcendantale.
  • Amélioration de l’attention : démontrée par une étude de Jha. La méditattion améliore l’attention sélective et soutenue.
  • Amélioration de la mémoire de travail : Zeidan a observé une amélioration significative de la mémoire de travail après seulement 4 jours de méditation de pleine conscience.
  • Flexibilité cognitive : Moore & Malinowski ont constaté une meilleure flexibilité cognitive et capacité à inhiber les réponses automatiques chez les méditants.
  • Augmentation de la compassion et de l’empathie : Une étude de Lutz ) a montré que la méditation de compassion augmente effectivement l’activité des régions cérébrales associées à l’empathie et renforce les comportements prosociaux.
  • Réduction des préjugés : Kang a démontré que la méditation de pleine conscience réduit les biais implicites raciaux et les comportements discriminatoires.

C’est pas beau tout ça ? Attendez… c’est pas fini ! Il y a aussi des applications cliniques…

  • Prévention des rechutes dépressives : La thérapie cognitive basée sur la pleine conscience réduit de 44% le risque de rechute chez les patients ayant connu trois épisodes dépressifs ou plus (Kuyken).
  • Gestion de la douleur chronique : Le programme de Jon Kabat-Zinn a démontré son efficacité dans la réduction de la perception de la douleur chronique.
  • Troubles anxieux : Une méta-analyse de Hofmann a confirmé l’efficacité la méditation de pleine conscience pour réduire les symptômes anxieux et dépressifs.

Ah oui, c’est vrai, c’était le sujet de l’article… Ben… comment dire ? Eh bien voilà : je n’ai trouvé aucune étude scientifique centrée sur les effets sur la mémoire. Les scientifiques sont bien plus intéressés par les effets sur le cerveau. Ce qu’ils découvrent sur la mémoire se fait en passant, on sent bien que ce n’est pas leur sujet.

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Néanmoins, pas mal d’études sont arrivées à quelques conclusions intéressantes malgré tout. Les voici :

  • La méditation améliore la mémoire à court terme.
  • La méditation améliore la mémoire de travail. Cela a été démontré chez des étudiants et… des militaires (étude de Jha). Une étude de Mrazek montre qu’un entraînement de 2 semaines à la méditation améliore les performances aux tests de mémoire de travail. Outre les études déjà citées plus haut, celle de Quach montre des améliorations significatives de la capacité de mémoire de travail chez des adolescents après un programme de méditation de pleine conscience de 4 semaines. En fait, l’amélioration de la mémoire de travail est le point le plus souvent rapporté par les auteurs.
  • La méditation augmente la qualité de l’attention. La même étude (Mrazek) montre également que cet entrainement réduit le vagabondage mental. Or l’attention est la porte d’entrée de la mémoire.
  • La méditation renforce structurellement l’hippocampe. Plusieurs études le confirment. Or, il se trouve que l’hippocampe est très impliqué dans la mémoire.
  • La méditation réduit le stress. Et l’on sait que le stress est le meilleur ennemi de la mémoriation et de la remémoration.
  • La méditation a un effet antidépresseur. Encore un ennemi de la mémoire affaibli…
  • La méditation pourrait avoir un effet positif sur la mémoire épisodique. C’est en cours de débat.
  • La méditation limite la perte des neurones chez des personnes âgées. Cet effet a été trouvé par Luders chez des pratiquants de longue date. Toutefois, il n’est pas certain qu’il y ait un rapport de cause à effet entre la perte des neurones et un affaiblissement de la mémoire. C’est plutôt la masse des connexion qui comptent.

Eh bien déjà, je pense que vous ne vous attendiez pas à trouver autant de bénéfices à pratiquer la méditation. Ils sont fort nombreux. Et surtout, il ne s’agit plus désormais des seules affirmations des promoteurs de la méditation. De très sérieux chercheurs autour du monde ont vérifié ces effets.

Ces recherches souffrent peut-être d’être encore très dispersées (d’où la nécessité et l’intérêt des méta-analyses). Elles souffrent assez souvent aussi de portée sur de petites cohortes. Il est vrai que les résultats d’une étude portant sur 30 personnes aura des résultats moins significatifs que ceux d’une étude portant sur 3.000 personnes. Mais il est vrai aussi que lorsque qu’une forte majorité des « petites » études vont dans le même sens, les grandes études finissent par confirmer leurs résultats.

Pour moi, il est clair qu’on peut affirmer l’effet positif de la méditation (toues pratiques confondues) sur le cerveau et sur la fonction de mémoire.

En attendant, que disent les intéressés ?

  • Dan Harris, journaliste à ABC News et auteur de 10% Happier : « La méditation m’a permis de gérer mon anxiété et mes pensées obsessionnelles. Après une crise de panique en direct à la télévision, cette pratique m’a apporté une stabilité émotionnelle que rien d’autre n’avait réussi à stabiliser. »
  • Pema Chödrön, enseignante bouddhiste : « En méditant, j’ai appris à rester présente même dans les moments difficiles. Cela a renforcé ma compassion envers moi-même et les autres. »
  • Cameron Diaz (témoignage vidéo trouvé sur YouTube) : « Quand vous n’arrivez plus à penser à quoi que ce soit, vous méditez pendant vingt minutes et tout ce qui était éparpillé reforme un tout ».
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Témoignages anonymes de participants à des études sur la méditation

  • Alice, architecte : Après plusieurs mois de méditation quotidienne, j’ai constaté une nette amélioration de mon humeur et un recul de mes crises d’anxiété. Aujourd’hui, j’arrive à prendre du recul face aux difficultés. »
  • Samuel, enseignant : « La pratique régulière me rend plus patient avec mes enfants, moins réactif et plus ouvert aux petits bonheurs quotidiens. Cela a vraiment changé ma façon de vivre. »

Comme on le voit, les personnes interrogées ne font jamais mention de l’amélioration de leur hippocampe ou de leur mémoire de travail, car cela ne se ressent pas. Au contraire, la diminution du stress et des réponses émotionnelles réflexes, l’amélioration de l’attention et de la clarté de pensée, tout cela se ressent comme un mieux-être. Les témoignages sont des illustrations partielles. Seules les études scientifiques parviennent petit à petit à documenter ce qu’il se passe vraiment.

Si vous n’avez pas peur du vocabulaire scientifique, vous pouvez cliquer sur quelque URL, par exemple celle-ci, à moins que vous ne préfériez celle-là, (un résumé très accessible) ou encore cette autre… qui vous donne accès à un article scientifique complet. Celle-là n’est pas mal non plus, j’en ai lu une douzaine de ce genre. Bon courage.

Il parait que ça va devenir obligatoire de le signaler… Pour la première fois, à titre expérimental, j’ai utilisé des inintelligences artificielles (1) pour la recherche documentaire. An savoir : Chatte Gépété 4.1, Gemini 2.5 Flash, Claude 3.7 Sonnet (reasoning), Deep Seek R1 (Nitro), Llama 3.3 Nemotron Super 253B V1 et Sonar (reasoning). Pas sûr que ça m’ait fait gagner du temps…

(1) pour mémoire, l’IA est un système qui ne comprend rien à ce qu’on lui demande et qui ne comprends rien non plus à ce qu’il nous répond. Raison pour laquelle on ne peut pas parler d’intelligence. Mais les résultats sont parfois remarquables.

Je me suis ainsi amusé à faire dialoguer Chatte Gépété (dans un groupe de travail auquel je participe on l’appelle aussi Gepetto) et Gemini et le résultat est assez sidérant. On peut obtenir assez souvent une conversation de haute tenue qui dépasse largement ce qu’on entend au « Café du Commerce ».

A mon sens c’est une sacré claque pour l’orgueil humain. Jusqu’à maintenant, il allait de soi qu’une conversation sensée, apportant des informations, des idées, faisant des hypothèses, rebondissant sur l’argument de l’autre etc. ne pouvait exister que grâce à l’intelligence des protagonistes.

Eh bien, GPT et Gemini ont fait cela sans aucune intelligence, sans aucune compréhension de ce qu’elles se sont raconté. Dès lors, quand nous discutons entre humains, on peut douter : puisque de tels échanges ne nécessitent pas d’intelligence, utilisons-nous vraiment la nôtre ? Et si oui ou si non, comment le prouver ? On devrait poser cette question au bac de philo.