Le Club Memori
Pour ceux qui veulent comprendre, maintenir et améliorer leur mémoire.
Vulgarisation scientifique, méthodes, trucs et astuces pour bien mémoriser.

Certains lieux sont-ils propices pour apprendre ? Est-il plus efficace de réviser dans un endroit plutôt que dans un autre ? Il se trouve que… oui. Mais l’endroit idéal existe-t-il vraiment ?

Honnêtement, je n’avais pas encore vraiment approfondi cette question. J’ai bien sûr des souvenirs du temps où j’étais lycéen ou étudiant. Des souvenir d’examen à préparer, notamment.

Par exemple, j’allais chez mes grands-parents qui habitait sur les hauteurs d’une colline à l’écart du centre-ville. Ils avaient une modeste maison composée de 3 pièces en enfilade. La dernière était une chambre silencieuse puisqu’une autre chambre faisait tampon avec la cuisine qui, en ce temps-là, était aussi la « pièce à vivre ».

Dans cette chambre j’étais tranquille pour travailler. A l’époque, je ne cherchais pas l’endroit idéal. Mais seulement un endroit plus tranquille que chez mes parents. C’est ainsi que j’ai préparé mon examen principal à l’Université. En revanche pour les apprentissages en continu, pendant l’année universitaire, je procédais autrement. Mes grands-parents habitaient trop loin…

À l’époque je cherchais en permanence les meilleurs moyens de retenir ce que j’apprenais. J’ai toujours été du genre expérimentaliste… J’ai donc aussi expérimenté différents endroits.

Mais est-ce généralisable ? Est-ce valable pour tout le monde ? Je ne m’étais pas posé cette question. Je m’y suis plongé parce que Marie-Océane, une lectrice, sentant probablement arriver le temps des examens m’a posé la question. « Où devrais-je m’installer pour mieux apprendre et surtout pour mieux réviser ? », me demande-t-elle.

Cet article est donc ma réponse. Si vous êtes lycéen ou étudiant, vous pourrez sans doute y trouver un intérêt.

L’endroit idéal pour apprendre ou réviser ?
Y a-t-il une réponse universelle à cette question ?

Mon premier mouvement a été de penser que non. Après tout, quand j’étais étudiant, j’ai suivi mon « instinct ». J’ai juste choisi des lieux qui me convenait à moi. Il me semblait que chacun pouvait avoir ses propres préférences en matière de lieu d’étude. Et je ne cherchais pas l’idéal.

Oui, mais vous me connaissez, j’ai l’esprit scientifique dans la peau et cela m’a ouvert 2 autres questions.

  1. Y a-t-il déjà eu des études scientifiques sur la question ?
  2. Si oui, ont-elles déterminé ce qui serait favorable à un bon apprentissage ou à une révision permettant de mieux se remémorer les choses apprises ?

Eh bien, figurez-vous que la réponse est oui aux deux questions.

Donc, il en ressort que le meilleur endroit pour apprendre ou réviser est celui qui présente les caractéristiques favorables évoquées au point 2.

On ne peut pas dire qu’on peut déterminer un lieu idéal en soi. Par exemple, j’ai déjà lu qu’une bibliothèque est un lieu idéal pour ça. Eh bien, on ne peut l’affirmer que si cette bibliothèque présente ces caractéristiques favorables. Sinon, mieux vaut s’installer ailleurs.

Donc, mon premier mouvement était le bon. Il n’y a pas d’endroit idéal en soi. Mais les lieux qui présentent les bonnes caractéristiques sont les meilleurs. La question d’origine change donc de nature. Il faut juste se demander : « Quelles caractéristiques doivent présenter les lieux propices aux apprentissages et aux révisions ? ».

Le meilleur endroit pour réviser… quelles particularités doit-il présenter ?

Pour un travail productif, pour une révision efficace, de nombreuses études ont été faites. Et, ça tombe bien, la plupart d’entre elles ont été faites dans des établissements scolaires et surtout des Universités.

Ce qui veut dire que les résultats sont directement transposables pour vous si vous êtes lycéen ou étudiant. Ou même, si vous en avez passé l’âge, mais que vous êtes en reconversion professionnelle, reparti à l’école en quelque sorte.

Voici donc les caractéristiques sur lesquelles toutes les études s’accordent. Pour arriver à ces résultats, les chercheurs ont constitué différents groupes équivalents. Chaque groupe a été soumis à des conditions d’apprentissage différentes, en laboratoire. On a comparé ensuite les résultats des différents groupes en termes de remémoration. Et voilà ce qu’il en est ressorti…

Le calme.

Tout a été testé en laboratoire. Par exemple, apprendre dans un milieu totalement silencieux. Ou avec bruit de fond, musique instrumentale, chansons, conversations…

Résultat : le pire ce sont les chansons et les conversations. Parce que si vous les entendez et les comprenez, cela mobilise votre mémoire verbale, qui est celle des mots Mais aussi votre mémoire sémantique qui est la mémoire des significations. Or, ce sont ces mémoires dont vous avez besoin pour apprendre et réviser. Elles ne peuvent pas faire deux choses à la fois.

Musique instrumentale et bruits de fond moyennement forts ont aussi des effets négatifs sur votre activité cognitive. Finalement, c’est le milieu silencieux, avec de légers bruits de fond non identifiables qui donnent les meilleurs résultats.

A noter que les musiques très rythmées ont des effets négatifs même en faible bruit de fond. Mais ce n’est pas vrai des musiques « calme » et linéaires auxquelles le cerveau semble s’habituer… C’est la revanche de la « musique d’ascenseur » !

Toutefois, un certain nombre d’études montrent que si vous écoutez de la musique, de multiples zones de votre cerveau s’activent. Un vrai feu d’artifice. Il semblerait même qu’après avoir écouté de la musique, vous soyez nettement plus capable de résoudre des problèmes…

Moralité : il serait plutôt malin d’écouter de la musique avant de vous mettre à travailler Ensuite, prudence.

En laboratoire, le silence total n’est pas bon non plus. Parce que c’est une « privation » sensorielle. Vous avez l’habitude des bruits de fonds légers. Les supprimer complètement vous met en « vigilance acoustique ». C’est comme si vous attendiez en vain ces sons qui ne se produisent pas. Cela peut même créer une assez forte anxiété. Le calme oui, le silence complet, non.

Le confort oui, mais le dos bien droit…

Le confort

On n’y pense pas, mais l’inconfort accapare votre attention Vous ne pouvez pas vous concentrer aussi bien qu’en étant suffisamment confortable. Mais pas trop ! À vrai dire, je n’ai pas trouvé d’études montrant des différences selon que vous êtes assis sur une chaise en bois ou une chaise rembourrée…

Mais des études montrent, par exemple, qu’apprendre en ayant le dos bien droit donne de meilleurs résultats que si vous êtes « avachi » sur votre siège !

La notion de confort ne concerne pas que l’assise. Cela comprend aussi l’éclairage. Son insuffisance crée de la fatigue oculaire et ralentit la compréhension. La température joue un rôle aussi. L’an dernier j’ai publié un post sous le titre « le réchauffement climatique nous rend-il plus con ? ».

J’y parlais de grosses études britanniques et américaines. Elles prouvent sans discussion possible que les résultats scolaires sont inversement proportionnels à la température ! C’est particulièrement spectaculaire par temps de canicule.

Les auteurs ont comparé des notes obtenues dans des centaines d’établissements jour après jour pendant des années. Ils ont comparé la courbe des notes jour après jour à la courbe des températures. C’est clair, quand la température monte, les notes décroissent… et inversement ! Donc, mettez-vous au frais. Vingt degrés, c’est toujours mieux que vingt cinq degrés…

L’absence d’interruption

Voilà un point très mal connu : les interruptions sont un ennemi mortel de la mémoire. Et apprendre ou réviser sans mémoire… Bref, le cerveau a besoin de continuité. Une fois qu’il s’est coulé dans un univers, il lui faut un moment pour en sortir. Et un autre moment pour y entrer de nouveau. Pendant ce double mouvement, vous ne faites rien de mémorisable.

Quand vous pouvez revenir à vos moutons, il existe encore dans votre cerveau une résonance, comme un écho du contenu de l’interruption. Il vous faut quelques minutes pour vous replonger là où vous en étiez sans être parasité par cette rémanence.

Et si d’autres interruptions surviennent ensuite, le temps pour vous y retrouver augmente par rapport à l’interruption précédente. C’est la raison pour laquelle on ne fait rien de bon, quand les interruptions sont fréquentes.

Il faut donc les réduire au minimum. Par exemple, en mettant votre téléphone en mode avion, en mettant en pause les notifications. En vous tenant à distance des sources de distraction. Et en faisant savoir qu’il ne faut pas vous déranger…

L’organisation

Votre cerveau, votre mémoire, ne sont jamais plus efficaces que dans un univers bien déterminé. Par exemple votre univers de révision… Ou votre univers de jeux vidéo… Ou votre univers d’activité sportive ou récréative. Toute sortie intempestive de l’univers du moment détériore vos performances cognitives. C’est ce qu’on vient de voir ci-dessus.

Il se trouve que l’organisation est un contrepoids à certains types d’interruption. Avoir à portée de main vos fournitures bien ordonnées en est un bon exemple. Si vous pouvez atteindre machinalement un dictionnaire, une gomme, un classeur dont vous avez besoin, vous ne sortirez pas de votre univers de travail. Si vous devez vous déplacer pour aller les chercher vous en sortez obligatoirement.

En matière de travail efficace, mieux vaut la routine que les errements. Je conseille même, si vous ne travaillez pas chez vous de vous constituer un petit univers matériel transportable, toujours le même.

Vous pouvez opter (par exemple) pour un sous-main constitué par une chemise cartonnée, éventuellement dépliée. Vous y posez vos documents et ustensiles, toujours disposés de la même façon. Se constituer un petit univers stable, ce n’est pas être obsessionnel. C’est seulement être efficace.

Quand vous vous installez dans votre univers de travail, votre cerveau mobilise des ressources adaptées quasi automatiquement. Et si vous vous installez dans un univers de jeux, il mobilise des ressources différentes. C’est une bonne raison pour ne jamais rien faire d’autre que travailler ou réviser dans votre univers de travail. La confusion des genres ferait baisser votre productivité.

Alors, l’endroit idéal pour réviser c’est lequel ?

Réponse : c’est celui qui présentera ces quatre spécificités. Accessoirement, vous préférerez certainement un endroit qui vous plait. Ou qui vous arrange ou qui est plus près de chez vous. Peu importe, du moment qu’il est calme, assez confortable, que vous n’y serez pas dérangé et que vous pourrez vous y organiser à votre manière.

Quels lieux pourraient bien correspondre à ce cahier des charges ?

Une bibliothèque

Pour mon travail courant j’allais assez souvent à la bibliothèque universitaire. Ces bibliothèques sont des endroits calmes et studieux. Vous pouvez alors vous concentrer sur ce que vous étudiez. A priori, vous n’y êtes pas dérangé, les bruits et les discussions y sont prohibés.

Le confort y est correct, en général les sièges sont bons. On y dispose souvent d’un bon éclairage, voir d’éclairages individuels. Et chaque emplacement est assez grand pour que vous puissiez y installer votre « univers » personnel de travail. Serait-ce le meilleur endroit pour travailler ou pour réviser.

Mais toutes les bibliothèques ne sont pas vouées à l’étude. De nombreuse bibliothèques municipales ou privées sont moins strictes. Il peut y avoir plus d’allers et venues, des discussions, vous pouvez y croiser des classes entières venues visiter et voir ce qu’est une bibliothèque.

Des animations peuvent y être organisées, des contes pour enfants, des ateliers mangas… Parfois même, des gens s’y donnent rendez-vous comme au café…

C’est pourquoi une bibliothèque n’est pas forcément le lieu idéal !

Un café

A priori, après ce que je viens de dire de certaines bibliothèques, choisir un café peut paraître assez osé.

Je me rappelle pourtant une autrice connue qui expliquait qu’elle ne pouvait plus travailler chez elle. Sa famille ne pouvait pas se mettre dans le crâne que lorsqu’elle écrivait c’était son travail et qu’on ne devait pas plus venir la déranger que si elle partait travailler dans une entreprise. Rien à faire. Ni ses enfants et même son mari ne parvenaient à s’abstenir de la déranger dans ses heures de travail.

Finalement, elle avait fini par réserver une table permanente au fond d’un café du quartier pour n’être plus dérangée. Elle ne dit pas si c’était le lieu idéal mais elle a tout de même écrit plusieurs livres dans ce café.

Il m’est arrivé plus d’une fois, en déplacement, de travailler ainsi. J’ai sans doute des facultés de concentration qui me font oublier les bruits ambiants. Mais il m’est arrivé aussi de me surprendre en flagrant délit de décrochage et en train d’écouter une conversation ! Sans compter que le café n’est pas gratuit… Il me parait difficile de conseiller cette solution à un étudiant. A moins d’une bienveillance particulière du cafetier.

Votre chambre

Là, c’est du cas par cas. Je ne connais pas votre situation mais je me rappelle la mienne. Quand j’étais lycéen je n’avais pas le choix, ma chambre était ma seule solution. Mais dans l’immeuble, les appartements n’étaient guère isolés. Alors…

Du second étage on entendait le chef de musique du rendez-de-chaussé jouer du piano. Quand mon père entonnait (rarement) son saxophone, on entendait les radios des voisins s’éteindre, ils préféraient écouter le saxo. Aujourd’hui ils feraient une pétition… Une autre époque !

Bref, pour ce qui était du silence et de l’absence d’interruption, on aurait pu souhaiter mieux. Et si j’en crois mes résultats au collège et au lycée, je ne devais pas avoir les mêmes facultés de concentration qu’aujourd’hui…

Lorsque, plus tard j’ai pu loger en cité universitaire ou chez l‘habitant, c’était beaucoup plus confortable. J’ai logé une année chez une veuve qui vivait seule dans un immeuble plutôt silencieux. Les conditions étaient bonnes et j’avançais vite dans mon travail.

En cité universitaire, j’ai connu des conditions moins bonnes. C’était parfois bruyant. Et lorsque des copains y résidaient aussi ils pouvait débarquer à l’improviste. La bibliothèque universitaire a pris le relais.

A l’évidence, c’est du cas par cas. Si votre chambre est tranquille et si vous n’y êtes pas dérangé, profitez de votre chance. Les chambres louées à des étudiants sont parfois sommaires. Quand le coin travail est limité certains en sont réduits à travailler sur leur lit. Difficile d’être organisé dans ce cas. Si les conditions ne sont pas bonnes cela vaut le coup d’essayer une autre solution.

Un espace de co-working

Ce n’est pas que pour les « solo entrepreneurs ». Certains espaces sont mixtes ou typés étudiants. Mais c’est plus cher que le café du coin.

Mais si vous êtes étudiant vous n’avez pas besoin d’un bureau attitré permanent.

Un bureau attitré permanent dans un espace de travail collectif coûte en moyenne 350 € par mois en province et nettement plus en région parisienne.

Toutefois, j’ai trouvé des locations « d’emplacements » (comme à la bibliothèque) entre 100 et 200 euros par mois. Ou pour 4 ou 5 euros de l’heure. On trouve aussi des forfaits mensuels pour 10 heures ou 30 heures par mois. Ou même des locations à la journée pour 20 à 50 euros.

Bref, c’est très variable. Cela peut dépendre des services associés : salle de réunion, wi-fi, cafétéria, salle de détente, cuisine collective, café à volonté… Les prix dépendent aussi de la clientèle attendue et de la nature de l’établissement. Si c’est associatif, ce sera toujours moins cher que si c’est commercial. Certains ont un tarif spécial pour les étudiants.

Ce qui m’amène à la question des horaires, les sites purement dédiés aux entreprises, ferment souvent entre 17 et 18 h le soir. Pas très adapté pour les étudiants. Mais j’en ai trouvé un, au Jardin des Plantes, à Paris, qui fonctionne 24 h sur 24, pour seulement 115 € par mois ! Si j’étais encore étudiant, ce serait peut-être mon endroit idéal…

Par ailleurs, pour l’ambiance et la tranquillité, il faut évidement voir sur place. J’ai trouvé un site Internet qui donne un répertoire de pas mal de ces espaces de co-working, avec photo et commentaires : https://passionteletravail.fr/category/categorie-coworking/. On y trouve même quelques espaces… gratuits.

En conclusion

Eh bien, c’est vous qui voyez… La bibliothèque universitaire semblerait bien cocher toutes les cases. Toutes les autres solutions sont à vérifier mais il est probable que ça ne sera pas idéal. En aurais-je oublié une ? Si vous avez trouvé une solution intéressante, merci de le faire savoir en commentaire.