Le Club Memori
Pour ceux qui veulent comprendre, maintenir et améliorer leur mémoire.
Vulgarisation scientifique, méthodes, trucs et astuces pour bien mémoriser.

 Etes-vous de ceux qui n’osent pas
prendre la parole en public ?

Parler en public sans notes en main ne demande pas beaucoup de mémoire. En fait le secret est ailleurs. Si vous connaissez bien votre affaire, savoir organiser votre contenu est beaucoup plus important qu’avoir une bonne mémoire. Au point que n’importe qui peut faire une intervention orale appréciée, sans notes et sans avoir une mémoire d’exception. 

(Mise à jour du 27 mai 2021)

Pourtant, beaucoup de personnes sont tétanisées à la pensée de devoir parler devant un auditoire. Il est vrai que cela ne fait pas partie des compétences scolaires de base apprises à l’école. C’est peut-être un début d’explication.

Un certain nombre de gens manque aussi cruellement de confiance en soi. Sans doute en faut-il un peu pour « oser » donner son opinion, contredire quelqu’un etc. Et sans doute cela devient plus difficile quand il s’agit non pas de réagir dans un échange de point de vue, mais d’avoir seul la parole et de tenir la distance sur un sujet.

Dans ces circonstances, il semblerait que la tendance qui domine encore consiste à sortir un papier de sa poche et à le lire. Les notes jouent alors le rôle d’une assurance contre la peur de perdre le fil de son discours.

L’inconvénient c’est que c’est fastidieux pour l’auditoire. Pouvoir se passer des notes, c’est pouvoir se connecter aux auditeurs, les regarder et les toucher.

Et cela sans grosse dépense de mémoire…

Ca vous étonne ? Pourtant c’est vrai. Et il y a beaucoup d’occasions dans lesquelles vous pourrez le vérifier.

L’occasion de faire une intervention orale
se présente assez souvent

Eh oui. Par exemple un exposé au lycée, une soutenance, un topo professionnel en petit comité ou une présentation en salle, un message à délivrer en formation, un speech pour un pot de retraite, l’évocation d’une personne disparue lors d’une cérémonie, un remerciement aux participants ou aux bénévoles de votre association, un argumentaire de vente, voire une conférence …

Mais je parle bien de prendre la parole sans aucun papier en main. D’ailleurs quand on parle d’intervention orale, cela signifie sans texte… Sinon ce n’est plus de l’oral mais de l’écrit…lu ! Cela se ressent tout de suite. Même si votre auditoire ne voyait pas, rien qu’à vous écouter il saurait que vous lisez.

Tout ça à cause d’une peur de l’oral pur, qui suppose d’abandonner ses notes. Du coup, vous n’en faites pas souvent. Vous préférez que d’autres s’y collent, si c’est possible.

Cette appréhension d’avoir à parler sans filet est très partagée. Elle peut varier d’une personne à l’autre. Et pour une personne donnée elle peut varier en fonction des circonstances. Parler dans un cercle d’amis n’a rien à voir avec parler avec un conseil d’administration qui tient votre carrière entre ses mains. Et intervenir oralement devant une assistance fournie est encore autre chose.

La plupart du temps, vous abordez cette « épreuve »  en fonction de la confiance que vous avez en vous-même. Mais il y a toujours de l’appréhension, la preuve: même les orateurs aguerris en ont avant de monter sur le podium. Mais là où ils font la différence c’est que parler en public ne leur fait pas peur. Cela se passe plutôt avant, une sorte de trac.

Imaginez-vous à la place de l’auditoire

C’est pourquoi, lorsque cette occasion est prévisible ou programmée, vous avez tendance à écrire un texte. C’est rassurant pour vous mais pas très agréable pour l’auditoire. Il vaudrait mieux que vous parliez naturellement.

Mais alors, vous risquez de remplacez la peur du public par la peur d’oublier quelque chose d’important… Il vous est donc nécessaire d’avoir une technique de mémorisation fiable afin que vous puissiez faire le job sereinement. 

Et justement, avec la bonne technique, vous pouvez parler à l’aise, sans stress, et ne rien oublier. Et surtout ne pas être ennuyeux. Il n’y a rien de plus pénible qu’un public qui attend poliment la fin de votre discours et qui apparaît soulagé quand vous avez terminé ! Si vous avez déjà assisté à une conférence avec un intervenant qui lit ses notes d’une voix monocorde, récitative et tête baissée, vous voyez ce que je veux dire. 

Surtout quand c’est long et que vous supputez le nombre de pages restant à lire… On a là le degré zéro de la communication avec le public.

Ne faites pas ça !

Un autre écueil, ce sont les « diapos » Powerpoint. Elles peuvent être utiles mais telles qu’on les pratique en entreprise elles sont généralement trop fournies. De plus soit l’orateur les lit (à un rythme inférieur à votre vitesse de lecture) soit il les commente pendant que vous essayez de les lire.

Ne faites pas ça non plus !

Dans les deux cas, si l’orateur demande à la fin « des questions » il s’en suivra un silence embarrassé avant que quelqu’un se décide. La faute à l’absence de connexion avec le public.

Il vaut beaucoup mieux vous présenter sans notes…

Peut-on mémoriser une intervention orale ?

Oui. Je vais vous faire le topo pour faire des interventions orales, disons entre 10 minutes et plus d’une heure, sans notes, en regardant bien en face vos interlocuteurs.

Parce que chaque fois que vous baissez le regard, vous perdez l’attention de votre public. Au mieux il va s’abîmer dans l’observation des mouches, au pire, il va chercher la météo du lendemain sur son smartphone.

« Sans regarder ses notes, mais comment fait-on ça ? »

C’est simplissime. Pour que vous puissiez mémoriser votre intervention, il faut la bâtir pour qu’elle soit mémorisable. Et le meilleur, c’est qu’alors votre propos sera également mémorisable par vos interlocuteurs. De ce fait vous deviendrez mémorable pour votre auditoire. Il se rappellera que vous avez fait une bonne intervention.

Eh oui ! Ça vous surprend ? Pourtant c’est évident, si vous l’avez bâti pour être mémorisable pour vous, votre propos devrait être mémorisable pour eux aussi. Certes, vous avez passé du temps pour mémoriser la substance de votre intervention que votre public aura dû, lui, capter à la volée. Mais, au moins, il retiendra les grandes lignes. 

Dans l’article « comment mémoriser un cours… et briller à l’oral », j’explique les bases de l’organisation qui fait mémoriser. C’est a priori destiné aux lycéens et aux étudiants, mais c’est valable pour tout le monde, y compris en milieu professionnel.

D’ailleurs, mes études sont loin, et l’exemple que je vais vous donner est celui d’une conférence d’une heure que j’ai donnée récemment. Sur la mémoire, évidemment. Pas les mains dans les poches, mais sans notes dans les mains. Ça tombait bien, il n’y aurait pas eu de pupitre pour les poser… Donc, tout dans la tête !

Même une conférence d’une heure ?

Oui.

Dis minutes ou une heure c’est pareil. En revanche, dans les deux cas, vous devez bien connaître votre affaire. N’espérez pas mémoriser quelque chose que vous ne connaissez pas bien ou que vous ne comprenez pas.

Heureusement, la plupart du temps, on intervient sur des sujets qu’on connait. Je sais bien qu’à entendre certaines personnes publiques on pourrait en douter… Mais bon, c’est de vous qu’il s’agit ici. On est bien d’accord que vous connaissez votre sujet !

Au congrès de la Mémoire mon intervention a été assez longue, mais ce qui est valable pour une heure l’est tout autant  pour un exposé plus court. Que ce soit dans un cadre scolaire, associatif ou professionnel, il est assez rare qu’on ait à parler plus de 20 minutes d’affilée. Vingt minutes, c’est d’ailleurs quasiment le format  promu pour les conférences TEDx par la Sapling Foundation (18 minutes, en fait).

Quoi qu’il en soit, vous devez bien organiser votre matière. 

Quelle est la bonne organisation ?

Je ne vais pas tout réécrire ici, allez voir un peu les autres articles. Mais rappelez-vous que le meilleur plan de récupération est celui qui contient le maximum d’indices de récupération. Et que ces indices doivent se présenter dans l’ordre dont vous avez besoin. Et le super plan pour ça, c’est l’arborescence. On n’a jamais trouvé mieux. Dites merci à Pierre de la Ramée, c’est lui qui a inventé ça, au 16ème siècle.

Pour que tout soit clair, voici une arborescence classique:

Une arborescence facile à mémoriser

Vous l’aviez déjà vu dans l’article sur les indices de récupération il y a quelques semaines. Ici vous avez un sujet (le monde animal) qui se divise en deux (les vertébrés et les invertébrés) lesquels à leur tout se divisent en plusieurs. Nous pourrions continuer sur plusieurs niveaux. Par exemple, es oiseaux ou les insectes peuvent avoir encore des sous-classes.

L’important, pour vous, c’est de respecter certaines règles. Par exemple de ne pas dépasser trois ou quatre niveaux. Et aussi de vous limiter à 4 ou 5 classes par niveau, à la rigueur 6. Dans l’exemple ci-dessus, vous avez 2 unités au premier niveau, puis respectivement 2 et 5 unités au niveau inférieur. C’est bien. Avec une organisation comme celle-là, vous pourrez météoriser votre intervention. Mais…

Pourquoi cette organisation ?

Il y a plusieurs raisons.

D’abord votre mémoire à court terme. Vous m’objecterez que la MCT (c’est son petit nom) c’est pour éventuellement mémoriser au départ, pas pour se rappeler ensuite. Ah bon ? Objection votre honneur ! Ce qu’on oublie généralement de préciser, c’est que, lorsque vous vous remémorez quelque chose, cela passe de nouveau par la mémoire à court terme…

Autrement dit, elle n’est pas au turbin seulement en première ligne entre les perceptions externes et vos circuits cérébraux. Mais également en dernière ligne,  entre vos circuits cérébraux et vos perceptions internes pour la restitution des informations stockées. 

Or, votre mémoire à court terme ne peut contenir au mieux qu’une demi-douzaine d’éléments susceptibles de passer en MLT (c’est le petit nom de la mémoire à long terme). Mais, c’est tout aussi  vrai qu’elle ne peut se remémorer qu’une demi-douzaine d’éléments à la fois.  Si vous en mettez plus, il va en manquer à l’appel lors de la remémoration.

Ensuite, une autre bonne raison c’est que la mémoire classe et trie elle-même les informations. Et que nous disent les recherches à ce sujet ? Eh bien, que la mémoire organise les informations stockées selon un schéma… arborescent. Donc, si vous utilisez un tel schéma, vous caressez votre mémoire dans le sens du poil, si j’ose dire.

Donc, vous mémoriserez plus facilement votre schéma. Ou plus exactement, vous faciliterez l’intégration (Retournez voir ici l’infographie (je l’ai refaite) si vous avez un trou de mémoire…). Toujours est-il que, lorsque vous aurez mémorisé le plan, le déroulé de votre intervention orale coulera de source.

Etude de cas:
comment j’ai rendu ma conférence mémorisable

Mémoriser ma conférence ne m’a pas paru plus difficile que mémoriser une intervention de 10 minutes. Et, effectivement, ça ne l’est pas. Il faut juste savoir de quoi on parle. Je ne vous parle pas d’apprendre votre sujet. Je présuppose que vous le connaissez. Vous devez être en mesure de répondre à toutes les questions qu’on vous posera.

Votre problème ce n’est pas ça. Votre problème, ou votre inquiétude, c’est plutôt de ne rien oublier… Et, accessoirement, de donner les informations dans le bon ordre pédagogique.

Pour vous aider à comprendre, je vous ai fait un tableau. Vous allez voir qu’il y a 6 chapitres et que chacun comporte 3 ou 4 sous-chapitres. Je vous laisse regarder.

L'arborescence pour mémoriser ma conférence

Les sous-chapitres (en blanc) ont encore 1 à 3 subdivisions que je n’ai pas représentées ici pour que le tableau reste lisible. Je n’ai fait ce tableau que pour vous montrer la structure arborescente. Depuis Pierre de la Ramée cette structure est devenue universelle. Par exemple, c’est celle du contenu du disque de votre ordinateur. C’est aussi celle de la table des matières de votre encyclopédie préférée. Etc.

Toutefois, ce n’est pas avec un tel tableau que je me suis préparé mais avec une table des matières. Elle tenait sur une page et demie de format A4.  C’est la première chose que j’ai vraiment apprise. 

Ma table des matières

MÉMOIRE ET LANGAGE
• Préhistoire : la mémoire est la première habileté cognitive.
• Présentation de Branag, dépourvu de mémoire verbale, sémantique ou lexicale…
— mais qui mémorisait pourtant, oui mais comment ?
• Présentation de Wanda, née dans le langage et pourvue de mémoire verbale…
— et qui mémorise autrement…
• Les effets de l’expansion de la mémoire

MÉMOIRE ANIMALE
• Une mémoire sans langage
• Des bourdons apprennent à jouer au foot
—Comment s’adaptent-ils à la nouveauté ?
—Équivalence chez l’Homme: obtenir 500 € contre un ticket de métro
• D’autres prouesses de mémoire animales, Emma et Ayumu.

MÉMOIRE DES PLANTES
• Comment les radis et les plants de tabac mémorisent et réagissent aux agressions
• Pourquoi le mimosa pudica reste zen malgré tous les efforts d’une chercheuse australienne
— Équivalence chez l’homme : quand la baignoire déborde … ou pas.
— L’apprentissage non associatif.
• De l’actine et de la myosine dans les racines…
• De drôles de « neurones » connectés,
— transmission d’information, réaction défensive et modification de l’expression génétique
(épigénétique) chez l’Arabette des dames…

DEUX MÉMORISATEURS PRODIGES
• La mémoire de Solomon Veniaminovitch Cherechevski.
—Les synesthésies selon Luria
—Inhibition de la mémoire sémantique.
• La mémoire de Daniel Tammet
• L’effet des synesthésies sur la mémoire

L’EFFET BOUBA / KIKI
• Test en salle

• Extension aux prénoms
• L’hypothèse du professeur Ramachandran
• Une autre hypothèse

LA MÉMOIRE AUJOURD’HUI
• Comment ça marche chez vous et moi ?
— La séquence neurologique
— La séquence cognitive
• Que pouvez-vous contrôler ?
— Les effets de la séquence cognitive sur la séquence neurologique.
• Le problème de mémoire le plus fréquent.
• Test « en live » des 6123 jours…

Analyse de ma table des matières

6 chapitres, 22 sous-chapitres, 12 subdivisions, donc 40 contenants à retenir. Cela peut vous paraître beaucoup si vous n’avez pas l’habitude. En fait, 6 chapitres, c’est parfaitement inhabituel pour une conférence.  C’est l’étendue de mon sujet (les prouesses de mémoire) qui m’a imposé ce chiffre.

La plupart des conférenciers professionnels se limitent à 3. Je vous conseille d’en faire autant ! Avec 3 sous-chapitres par chapitre, cela vous fait 12 contenants et non pas 40. C’est parfaitement gérable si vous débutez. 

Malgré tout, même avec 40 contenants, ça ne m’a as posé de problème. 

Regardez, en effet, le premier chapitre consacré à l’interaction mémoire et langage. J’y montre que la mémoire était là avant le langage, car sans elle il n’y aurait pas eu de survie. Je présente ensuite un personnage fictif avant le langage (Branag) et j’imagine comment il mémorisait. Puis un autre personnage fictif après le langage (Wanda) et j’examine sa façon de mémoriser. Et enfin à partir de l’extension de la mémoire, je conclus qu’elle a permis la culture et les civilisations.

Racontez une histoire

À aucun moment il n’y a de rupture de mon continuum de pensée. Je n’ai donc pas eu vraiment à mémoriser 4 sous-chapitres séparément. Une fois que le contexte a été brossé, je sais que j’ai deux personnages et leur façon de mémoriser à présenter, et qu’une fois cela fait j’ai une conclusion à en tirer.

Chaque sous-chapitre amène naturellement le suivant. Je ne vois vraiment pas comment j’aurais pu oublier de brosser le contexte, d’oublier soit Branag, soit Wanda, ou encore oublier de conclure sur l’effet civilisateur de la mémoire !

C’est une histoire que je raconte avec des éléments qui s’enchaînent automatiquement. Quand vous racontez une histoire, vous avez peu de chance d’oublier quelque chose. Et l’être humain aime les histoires.

Mémorisez les contenants, pas les contenus !

Je pourrais vous faire la même démonstration pour les autres chapitres. Chacun d’entre eux durait entre 8 et 12 minutes, soit environ une heure en tout.

Si vous devez parler 10 minutes, vous n’aurez peut-être que 2 chapitres avec chacun 2 ou 3 sous-chapitres, soit 6 à 8 contenants. Je les appelle ainsi parce que chaque chapitre contient des sous-chapitres qui contiennent des sous-divisions qui contiennent… le contenu !

Sauf que le contenu ne doit pas être appris. En effet, vous devez parler à votre public comme vous parleriez à des amis. Même si vous parlez à un examinateur, une assemblée de chefs d’Etat ou à une salle de 300 personnes ! Et il faut que vous ayez l’air de leur raconter une histoire, ou des histoires.

L’écrit est un piège. Il ne peut se justifier que pour calibrer votre temps de parole pour une intervention longue.

Mais une fois « en scène » vous devez apparaître comme un conteur. Vous devez donc connaître parfaitement le déroulé, le plan de votre histoire. Mais vous devez la conter, la raconter avec les mots qui vous viennent sur le moment.

C’est ce qui distinguera votre prestation des fausses interventions orales qui ne sont que des lectures d’écrit sans saveur et qui ne touchent pas le public.

Si vous devez intervenir longuement

C’est un cas de figure plutôt professionnel. Votre temps d’intervention est probablement déterminé à l’avance. On vous donnera 20 minutes, 40 minutes ou une heure, par exemple. Il va falloir vous régler sur cette durée, c’est une question de respect des autres.

Vous n’êtes généralement pas le seul orateur et il y a un programme minuté. On hésite à inviter ceux qui ont la réputation de ne pas calibrer leurs intervention. On apprécie, en revanche, ceux qui le font. Ce n’est pas si difficile.

Et là, pour ce calibrage, l’écriture peut être utile. Attention: n’écrivez jamais comme vous… écrivez. Ce n’est pas un article pour une revue. Ecrivez comme vous parlez à vos amis. Votre texte est juste un moyen provisoire pour ajuster la longueur de votre intervention. 

Apprenez à élaguer

Méfiez-vous, un speech dure toujours plus longtemps qu’on ne l’imagine. Il faut tester votre discours et puis élaguer. En ce qui me concerne, ma rédaction (en langage parlé) faisait plus de 20 pages. Je me doutais que c’était trop

Je l’ai présenté à un  auditoire réduit. Vraiment très réduit, puisque seul Hector y a assisté. Je lui ai raconté mon contenu (et non pas lu) assez lentement, debout avec la gestuelle, comme en public. Verdict: 1 h 30 !

Il  fallait enlever un tiers du texte. J’ai supprimé des sous-parties jusqu’à ce que le timing soit bon. Aujourd’hui, je suis très fier de vous dire qu’Hector est le chat qui en sait le plus au monde sur la mémoire…

Quand votre temps est trop long, le plus simple est de regarder le nombre de mots indiqué par votre traitement de texte (en bas à gauche avec Word). Une règle de trois vous dira combien de mots vous devez enlever. 

Attention, il ne s’agit pas de passer des heures à réduire la longueur de chaque phrase… ça ne marchera pas. Faites comme les journalistes, quand on leur demande de réduire dans l’urgence à cause d’une actualité imprévue.

Il s’agit d’élaguer dans vos idées, de supprimer carrément des sous-parties, voire des parties de votre plan initial. 

Autrement dit, si c’est trop long, vous ne pourrez pas garder toute la matière. Si on m’avait réduit mon temps de parole à trois quarts d’heure, j’aurais probablement supprimé carrément le chapitre « mémorisateurs prodiges » aussi intéressant soit-il. Et aussi l’effet bouba-kiki qui lui était lié. Je serais tombé à 40 minutes et ça aurait été le plus simple à faire. Il faut accepter de ne pas être exhaustif.

Faites un résumé

Maintenant que votre contenu est calibré, vous devez vous en éloigner pour éviter de réviser un texte alors que vous devez réviser des idées.

La solution est simple et consiste à faire un résumé. J’ai dit au début que l’arborescence est le meilleur plan de récupération qui soit. C’est vrai, mais il y a un ex æquo : le résumé ! Faites un petit résumé de chacun de vos chapitres. 

Dans mon exemple, mes 6 chapitres (15 pages) étaient résumés sur 2 pages et demie. Vos résumés, associés au plan (table des matière ou tableau) sont les vecteurs de votre mémorisation.

En milieu privé ou scolaire

Quitte à me répéter, vous ne devez pas apprendre vos contenus. Cela signifierait que vous ne connaissez pas votre sujet. On ne peut pas être à l’aise pour parler sans notes si on n’y connaît rien.

Certes, en milieu scolaire vous pouvez être amené à faire un compte rendu de lecture ou un exposé sur un sujet imposé que vous connaissez peu. Il va falloir vous approprier la matière avant de pouvoir la résumer. Cela implique de vous y intéresser et de vous documenter activement.

Votre connaissance sera toute neuve et un peu fragile, il est vrai. Contre-intuitivement, le résumé s’impose alors d’autant plus. Car il vous oblige à extraire l’essentiel, à synthétiser. C’est une excellente consolidation de vos acquis.

En milieu professionnel

En milieu professionnel, en revanche, la question ne se pose pas. Vous connaissez le sujet car il fait partie de votre métier.

Vous avez fait votre « texte » plus vite que l’étudiant à qui on a demandé un exposé sur un sujet qu’il est en train d’apprendre. À part ça, la technique est la même : plan, élagage pour la durée demandée et résumés…

Trois jours avant la conférence j’ai quand même lu une fois mon texte calibré (environ 15 pages). La veille j’ai relu mes résumés. Et enfin le matin du jour J, j’ai relu ma table des matières. C’est tout. Et ça s’est bien passé, merci.

Cela vous donne une étonnante liberté de ton et, surtout, une bonne connexion avec votre public, quel qu’il soit. Pour obtenir ce résultat, la formule « plan arborescent + résumés » est selon moi la meilleure.

Apprenez à « réviser »

Malgré tout, ça n’est pas fini… À partir de là, vous devez… réviser. Cela consistera à réviser plusieurs fois vos résumés ET à les faire suivre par votre présentation orale complète.

Si vous débutez, faites cela par tranches ; résumé du 1er chapitre suivi de son exposé complet ; ensuite résumé du 2ème chapitre suivi par son exposé complet, etc. Ne regardez votre texte de calibrage qu’ensuite, pour repérer si vous avez oublié quelque chose.

Quand ça commence à être bon pour chaque chapitre, vous pouvez passer à la révision d’ensemble : tous les résumés suivis de  votre intervention complète. Tâchez ensuite de tester plusieurs fois votre présentation devant quelques personnes.

Comme pour moi, votre chat pourrait faire l’affaire (le mien avait l’air intéressé) mais « les vrais gens » c’est mieux. Des amis, par exemple. Regardez-les, adressez-vous à eux, cherchez à capter leur attention et à les intéresser.

En ce qui me concerne, j’ai fait 2 ou 3 lectures de mes résumés par jour pendant une petite semaine. À ce moment-là, je connaissais évidement déjà mon plan sur le bout des doigts. J’ai dû ensuite tester l’intervention complète 2 ou 3 fois sur Hector.

Après quoi j’ai laissé infuser 3 ou 4 jours sans plus m’en préoccuper. Trois jours avant la conférence j’ai relu une fois mon texte calibré (environ 15 pages) que j’avais mis hors circuit après avoir fait mes résumés. La veille j’ai relu ces dernier. Et enfin le matin du jour J, j’ai relu ma table des matières. C’est tout. Et ça s’est bien passé, merci.

Dernier conseil

Attention : vous devez accepter que vos prestations ne soient pas identiques chaque fois. Et le jour J vous emploierez peut-être d’autres mots, d’autres expressions pour dire la même chose. Dites-vous bien que c’est normal.

Spontanément, vous aurez tendance régler sur l’ambiance du moment. Ces variations sont donc bon signe. Elles indiquent que vous vous adaptez à l’auditoire, à l’ambiance de la salle et que vous êtes en communication avec les autres. Votre façon d’être, votre vocabulaire s’en ressentira.

En faisant vos interventions orales sans notes en main, vous passez de l’artificiel (la lecture d’un texte) à l’authenticité, à la fluidité naturelle. Et vous verrez (dans le cas d’une conférence) que les questions fuseront sans qu’on ait besoin de les solliciter. Y compris, parfois, sur ce que vous n’avez pas traité quand vous avez dû élaguer !

À vous de jouer !